vendredi 28 décembre 2012

Agression d'un policier à Nice : les limites de la vidéosurveillance




L'agression d'un adjoint de sécurité à Nice le 25 décembre (lire ici) est révélateur à bien des niveaux. Outre le fait, pour l'adjoint de sécurité en question, qu'annoncer à ses agresseurs qu'il était policier n'a fait qu'empirer les choses et les exciter d'avantage, c'est sur ce qu'elle nous enseigne sur la vidéosurveillance que je voudrais revenir ici.

La vidéosurveillance a permis d'arrêter très rapidement les auteurs présumés de l'agression et Christian Estrosi s'en félicite à juste titre (lire ici).

Mais, si elle a permis l'identification et l'arrestation rapide, elle n'a en rien permis d'éviter l'agression en dissuadant ce groupe d'individus éméchés et violents d'agir. Et Patrick Allemand le souligne, également à juste titre (lire ici).

La vidéosurveillance, rebaptisée et aseptisée en « vidéoprotection », reste la figure la plus emblématique et la plus coûteuse du laboratoire niçois de lutte contre l’insécurité. Elle mobilise une part importante du budget dédié à la sécurité et une part importante des forces de polices. 

Sans entrer ici dans la bataille de chiffres prouvant ou non son impact sur la baisse de la délinquance et des atteintes aux personnes, il convient de rappeler des distinctions de bases. 

En matière de sécurité, on distingue les actions de prévention et les actions de répressions. Le maire est en charge de la prévention (dissuader les délinquants potentiels d'agir) et l’Etat (et donc le Préfet qui le représente dans le département), est en charge de la répression (identifier et arrêter les coupables).

jeudi 25 octobre 2012

Daniel Cohen, Homo Economicus, la postérité du vide

Le dernier livre de Daniel Cohen Homo Economicus, prophète (égaré) des temps nouveaux est un ouvrage touchant au cœur de nos difficultés contemporaines et mettant à nu les limites d'un système à bout de souffle.

Se livrant non pas à une énième analyse détaillée des mécanismes conduisant à la crise et à la faillite du système néolibéral, l'auteur s'attache à analyser les conséquences morales et sociales de cette dérive. L'économiste se fait alors philosophe et délaisse l'analyse froide des mécanismes financiers pour questionner le sens de l'évolution des conditions de travail et de vie, des rapports sociaux et familiaux. Se faisant, il revient à la question grecque de la vie bonne et de la recherche du bonheur, soulignant le paradoxe de notre époque : "Pourquoi le bonheur semble-t-il plus dur aujourd'hui qu'hier à atteindre malgré, dans les pays riches, une richesse matérielle beaucoup plus élevée ?"
 Un monde néo-darwinien voit le jour, où le plus faible est éliminé et "soumis au mépris des vainqueurs". Ce monde est celui de l'homo economicus, celui de la concurrence effrénée comme seule règle de management, de l'évaluation permanente, un monde dont les conséquences dramatiques nous poussent à repenser le rapport entre le bonheur individuel et la marche de la société.

samedi 22 septembre 2012

Pour des primaires ouvertes aux élections locales

Le débat sur les contributions déposées dans le cadre du congrès du Parti Socialiste de Toulouse a été écourté, en raison d'un calendrier très serré. De ce fait, la question de l'organisation de primaires ouvertes pour 2014 n'a pas été traitée comme elle aurait du l'être.
Plusieurs contributions ont pourtant porté cette proposition, et notamment la contribution des proches d'Arnaud Montebourg, l'un des principaux artisans des primaires de 2011, dont Paul Alliès est le premier signataire, "De la rénovation à l'innovation".
Trois arguments en faveur des primaires ouvertes aux élections locales :
1. Le moment 2014 :
 Les élections de mi-mandat constituent traditionnellement un recul du pouvoir en place et, potentiellement, une aubaine pour l'extrême droite. 
 Il faut impérativement que le rôle du PS et de ses alliés ne se limite pas à défendre le bilan de l'action gouvernementale.
 Une innovation telle que l'organisation de primaires ouvertes à gauche pour le choix du candidat aux élections municipales, forte du succès indéniable des primaires de 2011, permettrait de donner un souffle nouveau à cette élection et d'éviter un désaveu à la majorité présidentielle.
 Si les primaires 2011 ont été un formidable renouveau dans l'image du parti, la désignation du premier secrétaire marque à l'inverse un recul démocratique très net.
 Les primaires locales nous permettront de reprendre la marche en avant qui va de la rénovation des pratiques internes au parti à l'innovation démocratique.

Hannah Arendt, Etienne Tassin et la mondialisation

Qui s'interroge sur la mondialisation en vient inexorablement à cette question fondamentale : à quel type de domination correspond la mondialisation ?
 Etienne Tassin, au travers de différentes études philosophiques sur Hannah Arendt nous livre des clefs permettant de répondre à ce questionnement, ou, du moins, de l'affiner.
 Tassin a notamment publié un article intitulé De la domination totale à la domination globale. Perspectives arendtiennes sur la mondialisation d'un point de vue cosmopolitiquedans l'ouvrage collectif Hannah Arendt, totalitarisme et banalité du mal publié chez PUF en novembre 2011.
 Poser la question du rapport entre Hannah Arendt et la mondialisation peut au premier abord sembler anachronique. Malentendu qu'Etienne Tassin dissipe rapidement : il s'agit d'analyser le monde contemporain (à l'heure de la mondialisation), avec les catégories conceptuelles utilisées par Hannah Arendt (à l'heure du totalitarisme). Précisons d'avantage encore : l'entreprise d'Etienne Tassin consiste ici à utiliser la grille conceptuelle arendtienne pour appréhender la modernité, en l’occurrence la mondialisation, et, au final, à questionner l'héritage conceptuel arendtien.

Stéphane Hessel, Edgar Morin, et la démondialisation

Le petit opuscule Le chemin de l'espérance est paru chez fayard en 2011, pour la somme très abordable de 5 €.
Stéphane Hessel et Edgar Morin y dressent en quelques pages les enjeux de notre temps et appellent à la mobilisation d'un « puissant mouvement citoyen » et d'une « insurrection des consciences », seuls capables d'y faire face ( p.60).1
Le texte est riche et pertinent, les analyses sont puissantes. Le résistant et le philosophe nourrissent ainsi encore un peu plus notre réflexion commune. Plusieurs propositions concrètes sont émises comme la création de « maisons de la fraternité », d'un « service civique de la fraternité », d'un « conseil d’État éthique », d'un « office publique de la consommation », le développement de l'économie « verte », des coopératives, du commerce équitable, etc.
Pour autant, le projet ne se veut pas seulement « programmatique » mais aussi « paradigmatique », prônant un changement de mode d'appréhension du monde et de méthodologie cognitive, pour développer une politique du « Bien vivre » renouant avec l'idéal de la pensée grecque.
Aux totalitarisme du XXème siècle a succédé la tyrannie du capitalisme financier, se développant en parallèle de replis sur soi xénophobes et de fanatismes religieux. « La voie pour une politique du Bien vivre ne peut se développer si l'on entreprend pas juguler la pieuvre du capitalisme financier et la barbarie de la purification nationale » (p. 57)