mardi 7 avril 2015

Pour survivre, le Parti Socialiste doit se dissocier de la politique gouvernementale

En 2012, nous soulevions un espoir inespéré à travers le pays, nous mettions fin au sarkozysme présidentiel et nous détenions tous les pouvoirs. En trois ans, qu'en avons nous fait ?

Alors que le discours de notre candidat à la présidentielle était en phase avec les aspirations des électeurs, des soixante engagements au discours du Bourget, la politique menée une fois au pouvoir a décontenancé, puis déçu, puis suscité une sourde colère face à un sentiment profond d'inéquité.

De défaites électorales en défaites électorales, le Parti Socialiste pèse moins qu'avant sur les politiques publiques mises en œuvre au niveau européen, municipal et départemental. C'est autant de leviers permettant de changer la vie quotidienne des français qui nous échappent. Pire, nous remettons les clefs du pouvoir tantôt à une droite devenue trop souvent extrême, tantôt à l'extrême droite elle-même. Or, en fin d'année, auront lieu les élections régionales.

Que faire pour éviter une nouvelle débâcle en décembre 2015 ?

Je ne crois pas que la défaite de la gauche provienne principalement de la désunion de la gauche. Dire cela serait prendre un effet pour une cause et ne pas remonter à la source du problème. La désunion de la gauche n'est, en réalité, que la conséquence de la perte de repères et l'absence de ligne politique cohérente du Parti Socialiste, tenaillé entre son fond idéologique historique et la politique d'inspiration libérale menée par un gouvernement issu de ses rangs. On ne peut défendre des positions libérales à longueur d’année et feindre de s’étonner, ensuite, du rejet du Front de Gauche lorsque l’on s’assoit à la table des négociations. L'une des conditions de possibilité de l'union de la gauche est avant tout de tenir un discours de vérité et de cesser de s'enfermer dans le déni, et ce, de chaque côté de la table des négociations.

Si l'union de la gauche est bien évidemment décisive pour l'emporter, l'invoquer sans cesse sans s'interroger sur les causes qui l'ont rendue impossible aux départementales est, au mieux, un discours vain, au pire, un leurre volontairement entretenu. Et, sans vouloir faire ombrage à nos partenaires de gauche, je me dois de rappeler que la gauche, même unie, n'a jamais triomphé sans un Parti Socialiste fort. Si d'ailleurs, le Parti Socialiste en est réduit à dépendre de l'apport électoral de ses partenaires, c’est précisément parce qu'il a rompu le lien avec son électorat naturel.

Comment le Parti Socialiste peut-il reconquérir son électorat ?

Devant les renoncements à la parole donnée et aux engagements de campagne, devant la succession de choix opérés en dépit de la ligne idéologique et des valeurs défendues historiquement par le socialisme français et face à un gouvernement qui, malgré les désaveux électoraux consécutifs, maintient la même politique d'inspiration libérale, le Parti Socialiste, s'il veut survivre et contribuer à améliorer concrètement les conditions de vie des français, doit se dissocier de la politique gouvernementale.

Durant trois ans, nous avons tenté de réorienter la politique gouvernementale "de l'intérieur", pour certains au sein même du gouvernement avant d'être contraints de le quitter, pour d'autres au sein du groupe parlementaire socialiste, et, pour les plus nombreux d'entre nous, au sein même du Parti Socialiste. Mais, à chaque fois, nous avons fait face au même refus d'un véritable dialogue constructif et au même déni face à la réalité. 

Le Parti Socialiste doit retrouver son rôle d'aiguillon et redevenir force de propositions. Il doit défendre et expliquer les choix gouvernementaux qu'il estime positifs et, au contraire, alerter lorsque des décisions lui semblent contraires à l'intérêt général. Et, puisque contester sans proposer est chose vaine, il doit systématiquement proposer des alternatives aux mesures qu'il conteste. Il sera alors à nouveau utile aux Français, car, comme l'écrivait Descartes, "c'est ne rien valoir que de n'être utile à personne".

Certains ont annoncé sa mort possible, d'autres son inéluctable déclin. Le Parti Socialiste reste pourtant, encore à ce jour, le principal vecteur de progrès social en France en ce sens qu'il est le parti capable d'accéder au pouvoir et de donner force de loi aux idées justes et novatrices issues, le plus souvent, de la société civile. Ne gâchons pas ce formidable levier, cet outils d'émancipation individuelle et collective : si un parti politique peut devenir une "machine à trahir" ne servant que des intérêts particuliers, des égos démesurés habités par une soif de pouvoir sans cesse inassouvie, il est aussi constitué de militants désintéressés, de citoyens engagés œuvrant au quotidien pour une société meilleure et qui ne doivent en aucun cas renoncer.

Le Parti Socialiste n'est pas mort, il n'est rien d'autre que ce que nous en faisons.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire