mardi 30 juin 2020

Ecosocialisme municipal

Plutôt qu'une simple "vague verte" ce sont des coalitions de l'écologie et de la gauche qui ont rendu possible la victoire aux élections municipales. Loin des grandes théories, un écosocialisme de bon sens voit le jour. Emmanuel Macron, inapte à appréhender la prise de conscience écologique, incarne un libéralisme économique dont le rejet est le ciment de cet écosocialisme nouveau.

Au lendemain de l'élection d'Emmanuel Macron à la présidence de la République, le "ni droite ni de gauche" faisait fureur dans la presse, laissant croire à certains que les bases idéologiques des partis traditionnels étaient définitivement reléguées aux oubliettes. Je m'étais alors succinctement tracé une ligne de conduite politique simple, fondée sur deux impératifs que je pense plus que jamais d'actualité : écosocialisme et humanisme.

Les avidités des divers protagonistes rendant impossible une union autour de ces deux pôles, nous avons assisté aux Elections Européennes à des listes concurrentes portant des programmes similaires et à de logiques défaites, malgré une percée timide d'EELV.

Aux élections municipales de 2020, une lueur d'espoir apparaît : des coalitions pragmatiques entre gauche et écologie ont permis de faire basculer ou de conserver des grandes villes françaises : Lyon, Paris, Marseille, Bordeaux, Grenoble, etc., partout, des coalitions ont rendu possible la victoire. 

Sans attendre une refondation théorique et l'émergence d'un nouveau courant idéologique, un écosocialisme de bon sens a vu le jour. Là où les commentateurs voient une "vague verte", nous constatons au contraire que c'est la constitution de coalitions, que la tête de liste soit issue des mouvements écologistes ou des partis de gauche, qui a rendu la victoire possible. Or qu'est-ce qui a cimenté ces coalitions ? Les leçons de la crise sanitaire, sociale et économique du Covid-19, l'opposition commune aux méfaits du libéralisme économique, le fait que l'écologie comprenne qu'elle est de gauche.

Dans les villes comme Nice, où les tenants de l'écologie ont déclaré être "ni de droite ni de gauche", point d'union possible et défaite assurée. Le vieux débat du positionnement de l'écologie dans l'échiquier politique national sera ainsi, je l'espère, tranché. Le combat pour l'écologie et le combat social ne font qu'un.

Et quand des décisions pratiques doivent être prises, comme c'est le cas lorsque l'on doit gérer une commune ou une intercommunalité, l'évidence saute aux yeux : la santé publique, la qualité de vie des habitants et la préservation de l'environnement sont incompatibles avec les grands projets urbains favorisant le consumérisme effréné, le surtourisme, l'augmentation constante de la pollution et de la bétonisation, etc.

Et, malgré tous ses efforts de bon communiquant, Emmanuel Macron se révélera toujours inapte à porter la prise de conscience écologique pour cette même raison : il incarne la défense d'un libéralisme économique qui a montré toutes ses limites avec la crise du Covid-19 et dont le rejet cimente l'écosocialisme, l'union de bons sens de la gauche et de l'écologie. 

jeudi 18 juin 2020

Clôturer la ville de Nice, un triple aveu d'échec

Les Cigalusa, la place de l'Armée du Rhin, la Réserve... à chaque grille posée, la Ville de Nice avoue son incapacité à développer le lien social, à devenir une ville inclusive et à garantir la sécurité de tous.

Dès que des incivilités sont signalées de façon répétée dans un lieu de Nice, Christian Estrosi fait clôturer ce lieu et prétend le sécuriser.

Ainsi la place des Cigalusa, le square Mashall ou la place de l'armée du Rhin ont été clôturées, alignant de désespérantes rangées de grilles, enfermant ce qui devrait être des lieux de convivialité. Plus surprenant encore, le fait de clôturer et d'empêcher l'accès à la mer le soir à la Réserve. Parce qu'un groupe d'individus y commettait dégradations et incivilité on empêche tout le monde d'y accéder. Fini les couchers de soleil au bord de l'eau dans l'un des plus beau sites de la ville...

En réalité clôturer Nice constitue un triple aveu d'échec :

1. Un échec du vivre ensemble 

L'aménagement urbain est un levier puissant, aux mains des communes, pour favoriser le lien social. Le vivre ensemble commence par avoir la possibilité de se parler dans l'espace public. De grands boulevards qui ne sont que des lieux de passages font que l'on se croise mais que l'on se parle très peu. Des espaces sans banc ni jardin en bas de tours HLM poussent à se regrouper dans des cages d'escalier ou à "tenir le mur". Une place qui n'était qu'un carrefour de passage peut redevenir un lieu de vie, comme à Garibaldi, dès que l'on commence à y réinstaller des bancs. Les espaces grillagés enlaidissent la ville et empêchent les échanges.

Nice allie traditions et modernité. Elle s'ouvre sur le monde grace au tourisme. Elle ne doit pas devenir une juxtaposition d'espaces clos, une ville fermée et bunkérisée. Seule une ville ouverte peut favoriser le vivre ensemble. En voulant se protéger de l'extérieur on s'enferme soi-même.

En clôturant des parcelles de plus en plus nombreuses d'espace public,  la Ville de Nice renonce à y favoriser le lien social. Elle se révèle inapte à adapter l'espace public pour favoriser les échanges. Chaque espace clôturé est un renoncement au vivre ensemble.

2. Un échec de la société inclusive

Une société "inclusive" doit se développer sans exclure aucune catégorie de la population. 

Or la Ville de Nice prétend choisir qui a le droit d'occuper l'espace public et fait tout pour chasser ceux qu'elle juge indésirables. Elle déploie ainsi, par une série d'actions ciblées, une politique de ségrégation urbaine dont les premières victimes sont les SDF :

- couper l'eau place du Pin l'an dernier pour chasser les sans-abri

- jeter systématiquement les affaires de SDF (cartons, sacs de couchage, etc.) 

- refuser d'installer des toilettes et douches publiques gratuites en nombre suffisant partout dans la ville

- refuser de mener une politique d'hébergement d'urgence et de logement social à la hauteur des besoins 

- ne pas soutenir suffisamment les associations d'aide aux sans-abri et priver de moyens suffisants le CCAS et les travailleurs sociaux

- poser une double rangée de grilles devant le Palais de Justice pour chasser les SDF et rendre inaccessibles, un a un, les jardins publics en les clôturant

- etc.

Chaque grille posée, chaque sac de couchage jeté est une négation de l'inclusion sociale, un aveu de rejet et d'exclusion. La Ville de Nice renonce à sa vocation sociale, refuse de devenir une ville hospitalière et mène une politique discriminatoire.

3. Un échec sécuritaire

Pour empêcher des personnes créant un trouble à l'ordre public de se rendre sur un lieu où ils ont leurs habitudes, on grillage le lieu en pénalisant de fait les habitants qui n'y sont pour rien. Mais imagine-t-on un seul instant que les fauteurs de troubles vont gentiment rester chez eux ? Ils vont tout naturellement trouver un autre lieu de rassemblement un peu plus loin et continuer à se comporter de la même manière en génant d'autres riverains. On ne fait que déplacer le problème de place en place. Et quand toutes les places de la ville seront clôturées, les petits groupes convergeront et se regrouperont dans les derniers espaces libres. La Ville de Nice créera ainsi des groupes beaucoup plus nombreux et bien plus difficiles à ramener à la raison et à un comportement respectueux.

Nice est l'une des villes ayant le plus grand nombre de policiers municipaux et de caméras de vidéo surveillance. Elle consacre un budget énorme à la sécurité au détriment du social, de l'éducation et de la santé. Or clôturer une place où ont lieu des incivilités c'est renoncer d'emblée à rétablir l'ordre, c'est avouer à l'avance son incapacité à faire cesser les troubles sans empêcher les riverains d'accéder à cette place. La Ville doit garantir la sécurité des Niçois souhaitant passer une soirée au bord de mer à la Réserve et non leur interdire l'accès.

Chaque lieu clôturé à Nice est un aveu d'échec de Christian Estrosi à garantir la sécurité des Niçois. Il préfère les priver d'accès à ces lieux plutôt que de mener les politiques de prévention et, si besoin, de répression necessaires.

Au final, en posant systématiquement des grilles là où apparaissent des difficultés, la Ville de Nice avoue son incapacité à développer le lien social, à devenir une ville inclusive et hospitalière et à garantir la sécurité de tous.

samedi 13 juin 2020

Symboles publics de corruption, de racisme et d'esclavagisme: l'exemple niçois

La démocratie exerce légitimement son droit d'inventaire et réexamine les symboles de la République. Assumer notre passé permet de ne pas reproduire les erreurs commises et, à tout le moins, de ne pas les ériger en exemples. Or c'est très précisément ce que fait la Ville de Nice célébrant tour à tour des personnalités corrompues, racistes ou esclavagistes.

S'il revient aux historiens d'analyser et d'éclairer les faits historiques, lorsqu'une commune honore et célèbre une personnalité en lui attribuant un nom de lieu, nous entrons dans le champs de la décision politique. 

La République est faite de symboles, ils marquent l'appartenance à une communauté de destins et des valeurs communes, et l'inscription de nos propres actions au sein d'un récit commun. Or nous assistons à une contestation de symboles racistes ou esclavagistes un peu partout en France. La démocratie exerce ainsi, de façon légitime, son droit d'inventaire. Si je ne cautionne pas les actes unilatéraux de destitution d'une statue, il faut entendre la portée symbolique de ce geste politique. 

Dans une démocratie mature, nous devrions être capables de créer les conditions d'un examen posé et concerté du maintien ou non de certains symboles, statues, plaques et nom de rues afin de déterminer s'ils sont toujours en accord avec les valeurs de la République Française. 

Des statues d'esclavagistes, si elles ne doivent bien évidemment pas être détruites, pourraient être exposées dans des musées au lieu de trôner sur la place publique. Ce n'est que l'une des options possibles et nous devrions être en mesure de mener un débat démocratique serein sur cette question qui est loin de n'être que mémorielle. 

Mais, dans l'attente de cet examen du passé et des symboles érigés naguère, il est par contre impensable d'honorer à nouveau des personnalités racistes ou esclavagistes. C'est pourtant ce qu'a récemment fait la Ville de Nice, incurable laboratoire du pire, dont la politique d'attribution des noms de lieux révèle d'un sidérant manque d'éthique :

- Novembre 2018, attribution d'un nom de rue à Charles Pasqua, condamné à 18 mois avec sursis pour financement illégal de campagne électoral et à un an avec sursis pour détournement de fonds en 2010.

- Octobre 2019, inauguration du quai Napoléon 1er. Napoléon Bonaparte qui, outre l'instauration de l'Empire et le très grand nombre de morts dus aux guerres impériales, a notamment rétabli l'esclavage.

- Novembre 2019, inauguration de la rue Jacques Médecin qui, en 1974, a jumelé la ville de Nice avec celle du Cap en soutien à la politique d'apartheid menée en Afrique du Sud, qui a tenu des propos ouvertement racistes ("La France va être envahie par tous les macaques qui n'ont rien d'autre à faire que venir vivre chez nous"), et qui a été condamné en 1992 à un an de prison ferme pour délit d'ingérence, en 1995 à deux ans de prison ferme, cinq ans de privation de droits civiques pour détournements de fonds et trois ans de prison ferme pour corruption et abus de bien sociaux et, en 1998, à deux ans de prison ferme pour fraude fiscale.

- Février 2020, inauguration du cours et de la statue de Jacques Chirac, condamné à deux ans avec sursis en 2011 pour détournement de fonds, prise illégale d'intérêts et abus de confiance et qui a tenu, lui aussi, des propos ouvertement racistes ("le bruit et l'odeur").

On ne peut dans le même temps enseigner l'éducation civique à nos enfants et glorifier, au nom de la collectivité, des personnalités corrompues, racistes ou esclavagistes. Assumer notre passé consiste très précisément à ne pas reproduire les erreurs commises et, à tout le moins, à ne pas les ériger en exemples.

dimanche 7 juin 2020

Élections municipales à Nice et "amnésie" supposée : clarifications

En aucun cas la liste Viva n'a demandé, accepté ou refusé une fusion de liste avec JM Governatori et P Allemand. Si, fait improbable, elle avait accepté une telle fusion, je n'y aurais pas participé. L'éthique d'action demande constance et cohérence.

La liste "Viva ! Démocratie, écologie, solidarité" a fait à Nice, en peu de temps, une très belle campagne et je remercie chaleureusement toutes celles et ceux qui y ont participé. Il nous a manqué 720 voix pour être présents au second tour : ce n'est que partie remise. 

Cette aventure collective rassemblant quatre forces politiques (LFI, PCF, Génération.s et Ensemble) et des citoyens non encartés, au-delà de l'exercice démocratique de la campagne, constitue, je l'espère, l'acte de refondation et l'avenir de la gauche niçoise.

Je pensais ne plus écrire d'article sur cette élection mais le billet d'humeur de Thierry Prudhon publié dans Nice Matin ce jour, bien légitime puisque subsiste une incompréhension, appelle réponse. Notre liste serait devenue "amnésique" et prête à s'allier à Jean-Marc Governatori après l'avoir critiqué durant la campagne. Clarifications :

- Le Collectif citoyen 06 nous a invité à une réunion en vue d'une union au second tour. Nous avons convenu de nous y rendre et que nos représentants à cet échange reviendraient vers nous pour que nous puissions décider collectivement et démocratiquement de la position à adopter. 

- Avant que nous n'ayons eu à prendre cette décision et à voter en interne, nous avons appris que cette union ne serait pas possible suite à un refus de la liste AEI-EELV.

- En conséquence, en aucun cas la liste Viva n'a demandé, accepté ou refusé de fusion ni avec la liste menée par Patrick Allemand ni avec celle menée par Jean-Marc Governatori.

- Je pense que nous aurions refusé mais, respectant nos règles démocratiques internes, je ne peux l'affirmer puisque ce vote n'a pas eu lieu.

- Par contre, opposé à toute fusion de listes, j'avais prévenu mes colistiers et l'ensemble de l'équipe de Viva qu'en cas de fusion je me retirerais et ne participerais ni à une liste ni à une campagne commune.

J'ai décrit les choix politiques nationaux et locaux de Patrick Allemand et Xavier Garcia ici : Etre ou ne pas être de gauche à Nice. J'ai écrit aux écologistes niçois pour leur dire qui était Jean Marc Governatori et quel était le bilan de mandat de Juliette Chesnel et Fabrice Decoupigny ici : Lettre ouverte aux écologistes niçois. Il n'y a aucune amnésie de ma part et en aucun cas je n'aurais renié mes écrits et mes engagements.

Je devrais tout naturellement, face à aux dangers que représentent les politiques défendues par Philippe Vardon et Christian Estrosi, voter pour une liste EELV. Mais, en raison des éléments explicités dans ma lettre aux écologistes niçois citée plus haut, il m'est impossible, d'un point de vue éthique, de voter pour Jean-Marc Governatori. Je voterai donc "blanc" au second tour.

Au-delà de ces péripéties politiciennes imposées, l'urgence sociale, écologique et démocratique est là et appelle mobilisation, éthique d'action et responsabilité. J'y répondrai à mon niveau au sein de "Tous citoyens", de "Viva", et avec l'ensemble des citoyennes et citoyens prêts à s'impliquer pour cela.