Nice : du mésusage de la protection fonctionnelle
Christian Estrosi est coutumier des procédures bâillons, ces procédures visant à faire taire des opposants politiques, des journaliste d’investigation ou toute voix remettant en question le récit politique qu’il tente d’imposer. Il a ainsi intenté de nombreuses actions en justice contre les journalistes David Thomson (prix Albert Londres 2017), Elise Lucet, Loïc Tanant et Hélène Constanty, contre Séverine Tessier (porte-parole d’Anticor), contre des opposants politiques comme Patrick Allemand, Jean Christophe Picard, Juliette Chesnel, Christelle d’Intorni, et, à deux reprises, contre moi-même.
Ces procédures ont pour conséquence de judiciariser le débat public et d’encombrer inutilement les tribunaux. Elles amputent le débat public en réglant au tribunal ce qui devrait être débattu sur la place publique. Elles dissuadent par la peur d'un procès tout citoyen qui voudrait défendre des revendications fortes et elles portent atteinte à la liberté d’expression. Elles constituent de véritables procédés d'intimidation pour réduire des opposants au silence. Elles ne devraient pas avoir leur place en démocratie.
Dans le cadre de ces procédures bâillons Christian Estrosi a fréquemment recours à la protection fonctionnelle. La protection fonctionnelle est une disposition légale utile et souvent indispensable qui sert à protéger les agents publics et les élus contre les attaques ou les mises en causes pénales dont ils peuvent être l'objet dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions ou de leurs mandats. L’administration concernée prend alors en charge la défense ainsi que les frais de justice et les frais d'avocats nécessaires. Or dans ces affaires, le maire de Nice ne demande pas la protection fonctionnelle pour se défendre lorsqu’il est attaqué en justice mais lorsqu'il choisit délibérément d’attaquer lui-même des journalistes ou des opposants.
Il s'agit clairement là d'un usage abusif de la protection fonctionnelle, détournée de son objet premier, pour servir des intérêts personnels et électoralistes.
Dans les deux procédures que Christian Estrosi a engagées et a perdues contre moi, il aurait, selon ce qui a été déclaré en séance du conseil municipal, fait dépenser plus de 23 000 € aux contribuables niçois. Combien Christian Estrosi a-t-il gaspillé d’argent public sur l’ensemble des procédures en justice qu’il a lui-même intentées ?
Les Niçoises et les Niçois n'ont pas à payer l'acharnement politique du maire de Nice contre ses opposants.
Lors du conseil métropolitain du 22 octobre 2025 le maire de Nice a sollicité la protection fonctionnelle pour engager une action en justice contre Éric Ciotti. Si certains élus se sont opposés avec constance au détournement de l’usage de la protection fonctionnelle (Jean-Christophe Picard, Juliette Chesnel et, à l’autre bout de l’échiquier politique, Philippe Vardon), d'autres, proches du président de l’UDR, semblent avoir soudain découvert la question du bon usage des fonds publics en la matière. Mais, qu’il s’agisse de procédures engagées à l'encontre d'Eric Ciotti comme de toute autre personne, la protection fonctionnelle ne doit pas être instrumentalisée et les contribuables niçois n'ont pas à financer les règlements de compte politiciens du maire de Nice.
Le mésusage récurrent de la protection fonctionnelle à Nice, par le maire lui-même et sa majorité, soulève un double questionnement : sur le bon usage des fonds publics d'une part et, de l'autre, sur le dévoiement des dispositifs légaux et des fonctions électives à des fins personnelles.
Nice, le 3 novembre 2025
David Nakache