jeudi 22 décembre 2016

Vieillesse et précarité à Nice: il y a urgence !

Nice a un taux de pauvreté deux fois plus élevé que la moyenne nationale. C’est la 4ème des 100 plus grandes villes de France ayant le plus de personnes âgées parmi les personnes vivant sous le seuil de pauvreté. Il y a urgence. Le silence et l'indifférence règnent pourtant sur cette question. Mais rien de grave, cette année encore, nous élirons notre «stars senior» et notre «super mamie»...


Alors que la Ville de Nice conserve encore, vue de l’extérieur, une image de richesse et de vie facile, la précarité y est très importante et une catégorie de Niçois en souffrent particulièrement : les personnes âgées.

A Nice, de plus en plus de personnes âgées ne peuvent se soigner faute d’argent, mendient ou font les poubelles pour se nourrir.

De très nombreuses familles sont confrontées à l’épineuse question de la dépendance des personnes âgées et ne parviennent pas à placer leurs parents ou grands-parents dans des maisons de retraites ou des EHPAD.

Ces constats quotidiens sont confortés par une estimation récente, menée par le bureau d’étude Compas, qui a réalisé une comparaison des taux de pauvreté et une typologie des personnes vivant sous le seuil de pauvreté dans les cent plus grandes villes de France métropolitaine.

100 500 Niçois vivent sous le seuil de pauvreté (1000 € par mois), ce qui représente 28,5% de la population, soit 7% de plus que Paris (21,5%) et… le double de la moyenne nationale (14,5%) !

Nice est classée par l’étude dans la catégorie « C » : "Pauvreté élevée / sur-représentation des couples sans enfant et des ménages âgés parmi les personnes pauvres".

En effet, Nice présente un des plus forts taux de personnes âgées (8,6%) parmi les personnes pauvres. Seules Ajaccio (12%), Antibes (11,5%) et Cannes (10,1%) font pire.

Alors que plus de 8600 personnes âgées vivent sous le seuil de pauvreté à Nice, la question ne semble être la priorité ni du Conseil Départemental ni de la Ville de Nice, pourtant en charge des aides extra-légales aux personnes âgées.

Communiquer sur la « Silver économie », organiser chaque année le concours de « super mamie » ou la très médiatisée « Star Senior » sont sûrement de très bonnes choses, fermer les yeux devant le phénomène inquiétant de précarisation croissante des personnes âgées en est une autre.

Nice présente un taux de pauvreté deux fois plus élevé que la moyenne nationale. C’est la quatrième des cent plus grandes villes de France métropolitaine ayant le plus de personnes âgées parmi les personnes vivant sous le seuil de pauvreté. La situation est alarmante. L’indifférence et le silence règnent pourtant sur cette question.

Il ne fait pas bon vieillir à Nice. Mais ce n’est pas grave, l’an prochain, la Star Senior fera sûrement des claquettes…

Source de l'étude : Pauvreté et types de ménages : une typologie des intercommunalités

jeudi 8 décembre 2016

Délit de solidarité : la réponse du Préfet Leclerc, le déshonneur de l'Etat

Entre soutien politique à Eric Ciotti et tentative pour influencer les juges dans les affaires de délits de solidarité en cours, le nouveau Préfet des Alpes-Maritimes signe un texte polémique, méprisant et insultant. Il s'en prend à l'historien Yvan Gastaut et s'avère inapte à comprendre les actions citoyennes d'entraide, de solidarité et d'humanisme qui font pourtant honneur à notre pays.

Un préfet incarne l'Etat et doit faire preuve, en toutes circonstances, de sang froid, de discernement et de hauteur de vue. Le nouveau Préfet des Alpes-Maritimes, Georges-François Leclerc, fraîchement arrivé dans notre département, n'échappe pas à la règle. 
Il vient pourtant de prendre la plume dans Nice Matin, pour signer une violente diatribe en réponse à une tribune libre de l'historien Yvan Gastaut, publiée dans le même quotidien local (voir les deux textes en fin d'article). Le Maître de conférences niçois y dressait l'historique de la longue tradition de solidarité dans la Vallée de la Roya jusqu'aux gestes d'humanité récents des citoyens venant au secours de réfugiés ayant passé la frontière italienne. 
La réponse du Préfet est celle d'un homme impatient et imprécis, visiblement excédé, sortant de la neutralité de l'Etat pour alimenter une polémique aux arrières plans politiques évidents. Il vole au secours du Président du Conseil Départemental, Eric Ciotti, en assurant que ce dernier respecte bien ses obligations légales et prend en charge les mineurs isolés, niant ainsi l'évidence que tous constatent sur place. Mais, plus grave encore, prétextant  une réponse à l'historien, il porte la position de l'Etat sur la place publique et tente ainsi d'influencer les juges dont les délibérés sont attendus début janvier dans les procès de deux citoyens désobeisseurs, Cédric Herrou et Pierre Alain Mannoni (lire ici).
Passons rapidement sur le ton méprisant, l'outrance et les inexactitudes du propos : non, Monsieur le Préfet, l'analyse de l'historien, qu'elle vous plaise ou non, ce n'est pas "n'importe quoi". Non, Monsieur le Préfet, ce n'est pas parce que l'on décrit une réalité que vous ne voulez pas admettre qu'il y a "imposture" ou "injure". Non, Monsieur le Préfet, critiquer les règles de droit injustes que vous défendez ne veut pas dire manquer de respect ou dénigrer les fonctionnaires qui les appliquent. Non, Monsieur le Préfet, lorsqu'il agit par humanité et quand bien même cette humanité le pousse à la désobéissance, cela ne veut pas forcément dire que le citoyen est "manipulé". Non, Monsieur le Préfet, la solidarité n'est pas un délit, quand bien même elle montre au grand jour votre propre inaction et vos propres carences.
Car s'il y a des désobeisseurs dans la vallée de la Roya et plus généralement dans les Alpes-Maritimes, c'est avant tout pour pallier à l'inaptitude de l'Etat à faire face à la crise humanitaire majeure à laquelle nous sommes confrontés. De simples citoyens agissent là où l'Etat ne fait rien. Ils secourent d'autres être humains en périls, des personnes ayant fui des pays en guerre, traversé une partie du Sahara, la méditerranée, l'Italie, la frontière italo-française par les chemins de montagne et errent sur les routes, démunis, en ce début d'hivers.
Une jeune réfugiée a été blessée cette semaine en tentant de traverser l'autoroute pour passer la frontière. Trois personnes ont déjà trouvé la mort dans des circonstances similaires. Combien faudra-t-il de drames pour que vous réagissiez enfin, Monsieur le Préfet, au lieu de vous perdre en vaines polémiques ? L'exemple de Calais ne vous a-t-il donc rien appris ?
Et dire que ces actes de secours, envers et par delà des lois iniques, nous rappellent les actes des "Justes parmi les Nations" ne veut pas dire que l'on compare l'incomparable, que la République française soit assimilée au Régime de Vichy, ni que l'Italie d'aujourd'hui soit semblable à celle de Mussolini. Bien évidemment les désobeisseurs d'aujourd'hui risquent des amendes et quelques mois de prison quand les "Justes" d'hier risquaient la déportation et la mort. Mais le geste d'humanité de ces citoyens qui bravent l'interdit pour secourir ceux qui sont en danger, quand bien même le contexte est différent et les risques encourus sont moindres, est au fond de même nature.
Ces gestes d'humanité, Monsieur le Préfet, faits par de simples citoyens, sont l'essence même de notre grande Nation qu'est la France, terre de liberté et de fraternité. Ils perpétuent cette tradition de solidarité dont nous sommes fiers. Ils font battre le coeur de cette si belle République dont, par votre dogmatisme et votre mépris, vous faites aujourd'hui le déshonneur.
L'article d'Yvan Gastaut (Nice Matin, 29.11.2016) :
La réponse du Préfet Leclerc (Nice Matin, 07.12.2016) :

jeudi 1 décembre 2016

Le triple échec de François Hollande

Échec de la politique économique et sociale menée, du pacte de responsabilité à la loi El Khomri, atteintes au socle démocratique et à l'équilibre des pouvoirs en France, incapacité à rassembler les Français et à consolider l'unité nationale face aux attentats, la non candidature de François Hollande est la conséquence logique du triple échec de son quinquennat.


Nous ne devons pas nous laisser duper par un jeu d'acteur de 10 mn, fut il très bon. Nous devons au contraire regarder avec lucidité ce qui a été fait et ce qui n'a pas été fait durant quatre ans et demi.

Le quinquennat de François Hollande s'achève sur un triple échec 

Tout d'abord un échec économique et social cuisant : outre le non-respect des engagements de campagne (lutte contre le monde de la finance, renégociation des traités européens, etc. ), une politique de l'offre désastreuse avec 41 milliards d'euros versés aux entreprises sans contreparties en termes de créations d'emplois dans le cadre du pacte de responsabilité, une précarisation croissante de pans entiers de la population, notamment des personnes âgées, etc., et je ne reviens pas sur la loi Macron, la loi El Khomri ou la réforme des rythmes scolaires.

Ensuite des atteintes sans précédent au socle démocratique de notre pays et à l'équilibre des pouvoirs en France : un pouvoir judiciaire en retrait avec la loi renseignement et la prolongation de l'état d'urgence, un pouvoir législatif bafoué avec le recours répété au 49.3, sans parler de la tentative de rupture de l'égalité républicaine avec la déchéance de nationalité ou de la gestion inhumaine des migrants.

Enfin, face à la barbarie des attentats et aux terribles drames qui ont frappé notre pays, François Hollande n'a pas su rassembler les Français et n'a pas su consolider l'indispensable unité nationale. Il a divisé, il a remis en question les libertés fondamentales dont l'Etat est pourtant garant, il a amoindri l'image de la France dans le monde.

A tous ceux qui nous disent que ce sera pire si François Fillon ou Marine Le Pen gagne l'élection présidentielle et qu'en comparaison François Hollande apparaîtra comme un bon président aux yeux de l'Histoire je réponds oui, à l'évidence ce sera bien pire, mais si une majorité de Français ne voient d'alternative qu'en une droite extrême ou une extrême droite, c'est aussi parce que la politique menée par François Hollande n'a su redonner ni confiance ni espoir en un avenir commun.

Le bilan du quinquennat de François Hollande s'avère donc néfaste pour la gauche, pour la France et surtout pour les innombrables personnes en souffrance dans notre pays.

samedi 26 novembre 2016

Roya : désobéissance civile ou carence de l'Etat ?

 En décembre 2015, le Tribunal de Grande Instance de Grasse rétablissait, de fait, le délit de solidarité pourtant supprimé par la loi de janvier 2014, en condamnant Claire, 72 ans, pour un geste d'humanité (lire ici). Le Parquet de Nice poursuit aujourd'hui Cédric Herrou et Pierre Alain Mannoni pour la même raison.
J'ai rencontré Pierre Alain Mannoni lors de son procès, à Nice, le 23 novembre 2016. Le Procureur de la République a requis à son encontre - mois de prison avec sursis. Mais ce procès, à travers et au-delà de Pierre Alain, c'est le procès intenté à l'empathie, l'entraide et l'humanisme. 
Car s'il y a des citoyens désobeisseurs dans la vallée de la Roya, c'est avant tout parce que l'Etat et le Conseil Départemental des Alpes-Maritimes n'assument pas leurs obligations légales.
Or qui place aujourd'hui la solidarité sur le banc des accusés ? L'Etat, celui-là même qui ne porte pas assistance à personne en danger et qui vient stigmatiser ceux qui pallient à sa propre incurie.

Manifestation de soutien à Pierre Alain Mannoni lors de son procès à Nice

Les mineurs isolés non pris en charge
Un mineur isolé, c'est-à-dire un enfant ou un adolescent sans parent ni autre représentant légal, qu'il soit étranger ou non, doit être pris en charge par les pouvoirs publics au titre de la protection de l'enfance. Et il a droit à la protection et l'assistance de la France jusqu'à sa majorité.
Ainsi, si des habitants de la Vallée de la Roya, frontalière de l'Italie, doivent porter secours par leurs propres moyens aux mineurs isolés qu'ils voient errer sur les routes de montagne, en hivers, c'est parce que les pouvoirs publics ne jouent pas leur rôle. 
J'en appelle donc en premier lieu au nouveau Préfet des Alpes-Maritimes, M. Georges François Leclerc, pour que l'Etat remplisse ses obligations légales et que les Alpes-Maritimes ne restent pas une zone de non droit. 
J'en appelle en second lieu à Eric Ciotti, président du Conseil Départemental des Alpes-Maritimes, pour qu'il assume enfin les obligations légales qui incombent à sa collectivité et qu'il ouvre un lieu d'accueil supplémentaire pour mineurs isolés, près de la frontière italienne.
Un nouveau Calais à Vintimille
Concernant les majeurs, si l'on peut tergiverser sur les aspects juridiques, l'analyse de la décision politique est sans appel : le gouvernement français est en train de créer un nouveau Calais à Vintimille. Et la France agit vis-à-vis de l'Italie comme l'Angleterre a agit envers elle.
Combien de morts aura-t-il fallu, de personnes tentant de gagner l'Angleterre et y laissant leurs vies, pour que l'on démantèle enfin la jungle de Calais ? Combien de morts faudra-t-il à Vintimille et dans la Roya ?
Une jeune réfugiée de 17 ans, Mjmelet Berhal, est décédée récemment, renversée par un camion sur l'autoroute en tentant d'atteindre la frontière française. Un migrant est également porté disparu, vraisemblablement emporté par une crue de la Roya. Combien de drames encore avant que les autorités ne se décident à agir ?
J'ajoute que, sur le fond, rien ne justifie le fait d'empêcher des individus de déposer une demande d'asile dans le pays de leur choix et la fermeture de la frontière ne fait qu'enrichir les passeur et alimenter la traite des être humains.
Osons le dire envers et contre l'opinion communément admise : la libre circulation des individus devrait être la règle et constitue la seule solution viable. Il faut ré ouvrir la frontière italienne de toute urgence.
Où s'arrête le devoir de secours ?
Pierre Alain Mannoni a secouru trois jeunes Érythréennes, dont une mineure, qui ont traversé une partie du Sahara, le Soudan, la Libye, la méditerranée, qui sont restées plus ou moins longtemps dans les camps en Italie puis ont passé la frontière italo-française par la montagne.
Face à Pierre Alain, homme sensé et profondément humain, le procureur de la République, Jean-Michel Prètre, a tenté de dissocier le secours, acte noble et non poursuivi, de l'aide à l'hébergement et l'aide à la circulation de personnes en situation irrégulière. Mais le raisonnement du Procureur souffre d'au moins de deux erreurs majeures. 
La première est la limite entre le secours, l'hébergement et la circulation : où s'arrête le devoir de secours ? Faut-il, après avoir nourri et soigné une personne nécessitant un secours, la laisser sur le bord d'une route de montagne en hivers et sans moyen ? La remettre aux autorités en sachant qu'elle va être renvoyée en Italie et tentera à nouveau de passer la frontière au risque de sa vie ? Ne vaut-il pas mieux l'aider à rejoindre le reste de sa famille en Allemagne ou en Angleterre où elle demandera l'asile ? Secourir quelqu'un, est-ce vraiment ne voir qu'à court terme sans se soucier de ce qu'il adviendra demain de la personne secourue ? Quand des secouristes aident une personne ils ne vont pas simplement apporter les soins d'urgence, ils vont s'assurer ensuite du devenir de la personne et ne la quittent qu'une fois qu'elle est prise en charge et sécurisée.
La seconde erreur consiste à dire que Pierre Alain Mannoni a aidé à la circulation des personnes en situation irrégulière. Les trois Érythréennes qu'il a aidé ne sont que en situation irrégulière que parce que la France a décidé arbitrairement de fermer sa frontière avec l'Italie et qu'elle refuse de ce fait d'enregistrer leurs demandes d'asile. Un demandeur d'asile n'est en situation irrégulière que si sa demande est étudiée puis rejetée et qu'il reste malgré ce rejet. Mais on n'a même pas permis à ces trois personnes de déposer une demande d'asile en France.
Aider son prochain, tendre la main, secourir des personnes en souffrance, voilà ce que chacun d'entre nous devrait faire. Voilà ce que les pouvoirs publics devraient nous encourager à faire. Et voilà ce dont on accuse Pierre Alain Mannoni qui, par son geste d'humanité, montre l'absence d'humanité de nos dirigeants.
Dans les Alpes-Maritimes, c'est donc bien la faute de l'Etat et du Conseil Départemental qui pousse les citoyens à la désobéissance civile. Mais qu'ils prennent gardent, car nous sommes tous solidaires des citoyens solidaires de la Roya. Et le geste de Claire, de Cédric, de Pierre Alain et de bien d'autres, au fond, c'est notre honneur à tous, et c'est l'honneur de la France.

mercredi 9 novembre 2016

Election de Donald Trump, une victoire de plus pour le populisme

La victoire de Donald Trump n'est pas seulement une victoire des Républicains sur les Démocrates, c'est une victoire du populisme contre la démocratie et donc une défaite de la démocratie contre elle-même.

De nombreuses questions se posent : quelle politique internationale pour la France et l'Europe vis-à-vis des Etats-Unis ? Au sein de l'OTAN et de la coalition ? Aurons-nous enfin une politique étrangère européenne indépendante et cohérente ?

Mais, au-delà de ces questions, le populisme progresse et acte le désaveu de la classe politique dans son ensemble. Il se nourrit de la peur, du rejet de l'autre et du repli identitaire.

"Éduquer le citoyen" nous disait Rousseau. Le populisme gagne du terrain en France également. Saurons-nous le combattre et l'empêcher d'accéder au pouvoir en 2017 ?

La refondation de la politique n'est pas un simple slogan, c'est une urgente nécessité. Il revient à chaque citoyen d'y participer et de mener ce combat.