mardi 31 janvier 2017

"Muslim Ban" : les droites françaises en rêvaient,Trump l'a fait !

Le décret anti-musulmans pris par Donald Trump choque à juste titre l'opinion publique mondiale. Mais nous, Français, sommes tristement habitués à cette logique islamophobe, car c'est celle mise en oeuvre et souhaitée, ici, par les droites françaises : amalgame volontaire entre islam et islamisme, préférence confessionnelle dans l'accueil des réfugiés, laïcité dévoyée et anti-musulmane.

Le décret Trump interdisant l'entrée aux ressortissants de sept pays musulmans (Iran, Irak, Libye, Somalie, Soudan, Syrie, Yémen) aux États-Unis en raison du risque terroriste est, comme l'ONU l'a rappelé à juste titre, contraire aux droits humains. C'est une intolérable discrimination confessionnelle.

Mais ce que fait Trump n'est pas nouveau : il fait pour l'ensemble des musulmans issus de certains pays ce que des élus français ont fait pour les réfugiés et ce que certains souhaiteraient faire pour l'ensemble des musulmans.

En effet, la logique défendue par Donald Trump et celle défendue par Eric Ciotti, Christian Estrosi, Laurent Wauquiez ou Marine Le Pen sont strictement les mêmes : "bannir" les musulmans en raison du risque terroriste.

Quand Eric Ciotti condamne les actions de solidarité de Cédric Herrou (citoyen solidaire de la Vallée de la Roya qui aide les réfugiés), c'est en appliquant la même logique que Trump : "Qui peut dire avec certitude que dans les centaines de migrants que M. Herrou se targue d'avoir fait passer ne se dissimule pas un futur terroriste ?" (Nice Matin, 30.12.2016, lire ici).

Quand plusieurs élus locaux de droite, en 2015 et 2016, sur-médiatisent leur soutien aux Chrétiens d'Orient, choisissent de n'accueillir que des réfugiés chrétiens et refusent donc d'accueillir des réfugiés musulmans, c'est en appliquant déjà la logique que Trump suit aujourd'hui. Après les tentatives d'instauration de la préférence nationale par le FN, les "Républicains" instauraient, en France et dans l'indifférence générale, la préférence confessionnelle (lire ici).

Le premier, dans le débat public français, à avoir affirmé publiquement que des djihadistes s’infiltraient parmi les migrants pour s'opposer à l'accueil des réfugiés n'est autre que Christian Estrosi, alors maire de Nice. Il entretient volontairement, depuis longtemps, l'amalgame entre islam et islamisme en soutenant que l’islam est incompatible avec la démocratie. Précurseur dans le processus d'extrémisation de la droite française par un processus de choc des identités cultuelles, il déclarait également que la "3ème guerre mondiale" était engagée entre "l'islamo-fascisme" et la "civilisation judéo-chrétienne".

Or si l'on suit cette logique jusqu'au bout, qui consiste à voir en tout musulman un terroriste potentiel, c'est l'ensemble des citoyens de confession musulmane qui est visé. Et c'est précisément le glissement sémantique qu'a opéré Marine Le Pen en substituant progressivement la figure du musulman à celle de l'immigré comme bouc émissaire et cible principale dans ses discours et dans les éléments de langage du FN.

Au fondement de la logique de Trump, Le Pen, Ciotti ou Estrosi se trouve donc l'amalgame entre islam et islamisme et l'insupportable soupçon de terrorisme jeté sur tout musulman.

Mais, pire encore, cet amalgame a été institutionnalisé sous le mandat de François Hollande, par le gouvernement de Manuel Valls et par Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'intérieur en voulant réformer l'islam de France pour lutter contre le terrorisme. En effet faire de la réforme d'une religion un outils de lutte contre le djihadisme c'est entériner l'amalgame coupable entre les croyants de cette confession et les terroristes (lire ici).

Mettre au ban les musulmans en les empêchant d'entrer sur le sol américain dit Donald Trump. Bannir les musulmans de nos plages et de nos universités, disent de concert, ici, les défenseurs d'une laïcité dévoyée, dure, discriminante et anti-musulmane. Partout la même logique qui donne raison à ceux qui depuis longtemps parlent d'islamophobie. Partout le même rejet qui pousse les citoyens de confessions musulmane au repli communautaire. Partout cette logique absurde et contre productive qui fait le jeu des djihadistes.

L'actualité nous montre où nous mène cette logique et doit nous servir de leçon pour les échéances électorales à venir. Le "Muslim Ban" de Trump n'est autre que la mise en pratique de la politique souhaitée par les droites françaises, sous leurs différentes formes et différentes appellations.
Rappelons, pour conclure, les mots de Justin Trudeau, premier ministre canadien, après l'attentat terroriste qui a frappé une mosquée à Quebec avant hier : "La diversité est notre force".

samedi 28 janvier 2017

Nice, armes à feu dans nos écoles : transparence et débat public

La Ville de Nice a décidé de poster un policier municipal armé dans chaque école primaire en se basant sur un audit réalisé par une société israélienne. Or une arme a feu présente toujours un danger et l'école doit être préservée de l'angoisse sécuritaire. Les parents y sont interdits d'école et les citoyens tenus à l'écart : la sécurisation de nos écoles mérite transparence et débat public.

La dernière lubie sécuritaro-électorale de la Ville de Nice est tombée. Non, il ne s'agit pas, cette fois, des Roms, SDF, baigneuses en burkini, drapeaux étrangers ou mariés trop bruyants. 
Ils s'agit de nos enfants : un policier municipal armé d'un 9mn sera présent dans chaque école primaire. Oui, vous avez bien lu. Uniformes et armes à feu, l'école républicaine "sanctuarisée" cède le pas devant l'obsession sécuritaire post-attentat. 
Cette mesure est contestable pour moins quatre raisons :
1. L'armement des policiers municipaux
Nous étions nombreux, avant les attentats de 2015, à nous opposer à l'équipement des policiers municipaux en armes à feu en raison de leur mode de recrutement et de l'insuffisance de leur formation, en comparaison à celle dont bénéficient gendarmes et policiers nationaux. Étrangement, ces arguments ne seraient plus valables suite à la vague d'attentats sanglants commis sur notre sol. Or plus la menace est grande et plus nous avons besoin d'un dispositif sécuritaire efficace.
De deux choses l'une : soit pour être habilité à détenir et se servir d'une arme à feu il faut bénéficier préalablement d'une formation aussi exigeante que celle des gendarmes et policier nationaux, et dans ce cas il ne faut pas armer les municipaux, soit cela n'est pas nécessaire et on se demande alors pourquoi imposer cette formation aux gendarmes et policiers nationaux.
Ce n'est pas faire injure à nos policiers municipaux, très sollicités par ailleurs et dont les conditions de travail se dégradent, que de vouloir séparer clairement les prérogatives des uns et des autres. Aux maires la prévention de la délinquance, à l'Etat la répression. Que chacun se consacre pleinement à sa mission.
Il n'est pas acceptable que l'Etat se défausse de son obligation de protection des citoyens sur les communes ou les inter-communalités car l'égalité républicaine est rompue : selon que votre commune sera puissante ou moins fortunée, vous et vos enfants serez plus ou moins bien protégés.
Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'Intérieur, a ainsi commis une faute en incitant les maires à armer leurs policiers municipaux. Mais chaque maire reste décideur d'armer ou non ses policiers municipaux.
2. Des armes à feu dans les écoles primaires
Disons-le clairement : nous nous opposons à la présence d'armes à feu au sein des écoles primaires, même à la ceinture de policiers en uniforme, car une arme à feu présente toujours un danger. 
Le 22 janvier 2015 un militaire en faction devant le centre Habad Loubavitch de Nice a tiré accidentellement une rafale de trois balles qui n’a, heureusement, pas fait de blessé. La rafale était due à une erreur de manipulation de son arme, alors tournée vers le sol. Imaginez qu'une erreur de ce type se reproduise mais cette fois au sein d'une école primaire...
De plus, la présence d'armes a feu peut présenter un caractère anxiogène pour les petits. Il faut préserver l'école comme un espace d'apprentissage et de transmission des savoirs dédié à l'enfance. 
L'école doit être protégée des menaces potentielles à l'extérieur mais préservée de la peur de la pression sécuritaire à l'intérieur. Oui, il faut sécuriser les abords des écoles. Mais il faut aussi préserver l'enfance de nos enfants. 
Et si l'on doit intégrer la menace terroriste dans l'éducation civique c'est aux enseignants de décider quand et comment parler aux enfants de ce danger car eux sont formés et compétents pour cela. 
Les policiers municipaux affectés aux écoles recevront-ils une formation pour répondre de façon adaptée aux questions que ne manqueront pas de leur poser les élèves ?
3. Un véritable débat public sur la sécurisation des écoles 
La Ville de Nice, pour fonder sa décision, a rémunéré un cabinet d'audit israélien pour vérifier la sécurisation de ses écoles. Choix étonnant, sauf à considérer Israël comme un modèle de sécurité... et de démocratie.
Avant tout, Nice est-elle la seule ville française confrontée à ce problème ? Alain Juppé à Bordeaux ou Anne Hidalgo à Paris ne postent pas de policiers municipaux armés dans les écoles de leurs villes. A-t-on entendu quelqu'un s'en plaindre ? Les écoliers bordelais ou parisiens sont-ils moins en sécurité que les écoliers niçois ? Et que font nos pays voisins en Europe ? 
Financer un cabinet d'audit israélien n'est pas une caution en soi et Israël n'est pas un modèle sécuritaire transposable à la France. La sécurisation de nos écoles mérite un véritable débat public et que des éléments probants soient versés à ce débats et accessibles à tous : 
- Combien a coûté au Niçois l'étude menée par ce cabinet israélien ?
- Les résultats de cet audit sont-ils publics ? Et si non, pourquoi ?
- Quelles sont les écoles niçoises à sécuriser en priorité au regard de cette étude et quelles mesures ont été prises par la Ville ? 
- D'autres études ont-elles été menées, notamment en comparant les dispositifs mis en place ailleurs en France et en Europe ?
Nous demandons que la plus grande transparence soit faite et qu'un débat public ait lieu sur la sécurisation des écoles primaires à Nice.
4. Faire participer parents et citoyens
A Nice, les parents sont interdits d'école et ne peuvent plus pénétrer dans les établissements scolaires. Ils sont donc considérés comme un danger potentiel.
Or, si bien évidemment un terroriste peut se dissimuler parmi les parents d'élèves, le fait de provoquer un attroupement de parents accompagnant leurs enfants devant les école sans pouvoir y entrer engendre des problèmes de sécurité supplémentaires : mise en danger liée à la circulation, cibles faciles pour un terroriste que cet attroupement de parents et d'enfants devant les écoles.
Nos élus semblent ignorer un éléments simple et pourtant évident : les parents souhaitent par-dessus tout protéger leurs enfants. Nous serons donc les premiers à réagir et signaler un comportement suspect ou toute mise en danger de nos enfants.
Pourquoi fermer l'école aux parents alors que les parents sont les premiers agents de sécurité de leurs enfants ?
Les citoyens doivent être associés à la politique sécuritaire et ne doivent plus en être exclus. Faire participer les citoyens ne se résume pas à mettre en ligne un questionnaire biaisé leur demandant s'ils souhaitent que les policiers municipaux aient les mêmes prérogatives que les nationaux.
Et associer les habitants ne veut pas automatiquement dire que des brigades ciitoyennes se substituent aux forces de l'ordre : nous avons besoin de professionnels formés et compétents pour cela. 
La participation citoyenne est l'une des clefs de la réussite des dispositifs de sécurité. Les citoyens doivent être co-décideurs et acteurs de la politique sécuritaire locale, associés à chacune des étapes de son élaboration, de sa mise en oeuvre et de son évalutation. Nous le voyons à chaque comité de quartier où les questions sécuritaires reviennent sans cesse sans que cela soit formalisé et suivi d'effets probants. C'est à qui crie le plus fort et met le plus de pression sur l'élu local présent. Nous devons mettre en place une évaluation citoyenne des politiques publiques, et notamment des politiques sécuritaires.
Poster un policier municipal armé dans chaque école primaire, comme le veut la Ville de Nice est une fausse bonne idée. Cette mesure démontre à nouveau l'absence de réflexion globale sur la sécurité et la volonté de tenir les citoyens à l'écart des décisions les plus importantes. 
Nous savons, et le drame de Nice nous l'a douloureusement rappelé, que la sécurité est l’affaire de tous. Permettons donc à chacun d'y participer.

samedi 21 janvier 2017

Roya: l'Etat pousse-t-il les citoyens solidaires à la faute?

Les nouvelles arrestations musclées, perquisitions et gardes à vue prolongées dans la Roya témoignent de la volonté des pouvoirs publics de pousser à bout les désobéisseurs azuréens. Que cherche-t-on par ce harcèlement judiciaire et policier ? A engendrer violence et conflit ouvert pour décrédibiliser toute action de solidarité ? La mort de Rémi Fraisse n'a-t-elle donc servie de leçon à personne ?

Les nouvelles arrestations musclées, perquisitions et gardes à vue prolongées de citoyens solidaires de la Roya, dont Cédric Herrou, les 19 et 20 janvier 2017, témoignent de la volonté manifeste des pouvoirs publics de pousser à bout les désobéisseurs azuréens.
Déjà, alors que Pierre Alain Mannoni avait été relaxé, l'appel du Parquet marquait un choix délibéré et constant du gouvernement de rétablir le délit de solidarité, en dépit des promesses de campagnes et de la loi du 31 décembre 2012.
Si l'on regarde le fil des événements passés, nous sommes saisis par une posture littéralement "irresponsables" des pouvoirs publics :
- C'est le Procureur qui a fait le choix délibéré de poursuivre Pierre Alain Mannoni, ingénieur et enseignant à l'université de Nice, puis de faire appel de sa relaxe par le Tribunal de Nice.
- C'est le Préfet des Alpes-Maritimes qui a "signalé" Cédric Herrou, agriculteur, au Procureur qui a, à son tour, choisi de le poursuivre (délibéré le 10 février).
- C'est sous l'égide de ce même Procureur que l'évacuation médiatisée des locaux de la SNCF occupés pour y héberger des réfugiés, a donné lieu, en octobre 2016, à un déploiement de forces de l'ordre à l'évidence surdimensionné. 
- C'est ce même Préfet, représentant de l'Etat, qui s'en est pris de façon violente et totalement disproportionnée à Yvan Gastaut, historien, pour une tribune parue dans Nice Matin (lire ma réponse ici).
- C'est le Président du Conseil Départemental des Alpes-Maritimes, mis en cause par de nombreux observateurs pour la non prise en charge des mineurs isolés (lire ici), qui s'est lui aussi fendu d'une diatribe hystérique, cette fois directement contre la presse locale, Nice Matin encore, pour l'élection par les lecteurs du journal de Cédric Herrou comme citoyen de l'année (lire ma réponse ici)
- C'est cette même volonté politique, aveugle et intransigeante qui fait que Claire Marsol, 72 ans, maître de conférence à la retraite a été condamnée à 1500 € d'amande en décembre 2015 (lire ma réaction ici), peine confirmée en appel le 2 décembre 2016 ; que Magali M., fonctionnaire, sera sur le banc des accusés le 3 mars prochain ; que Francesca Peirotti, interprète, sera jugée le 4 avril ; que Ben, photographe, sera jugé le 8 avril ; qu'Eric, photographe de presse et Marie Rose, travailleuse social, seront jugés le 24 avril ; que Françoise Gogois, René Dahon, Gibi et Dan seront eux jugés le 16 mai...
Que cherchent les pouvoirs publics au juste par ces procès successifs ? A décourager toute tentative future de solidarité vis à vis des réfugiés qui fuient dictatures, bombardements et conflits armés ? 
Que cherche le gouvernement à travers les agissements du Préfet et du Procureur ? A pousser à bout les citoyens solidaires de la Roya, par un harcèlement judiciaire et policier constants, et qu'ils en viennent à des réactions violentes ? Le gouvernement espère-il que l'action de solidarité des habitants de la Roya dégénère en conflit ouvert pour crédibiliser leur action ? 
La mort de Rémi Fraisse n'a-t-elle pas servie de leçons au gouvernement ? Combien de Rémi Fraisse encore ? Ceux qui nous gouvernent n'ont-ils finalement ni discernement ni conscience ?
Si des citoyens solidaires en sont venus à désobéir c'est avant tout parce que l'Etat et de Conseil Départemental des Alpes-Maritimes n'assumaient pas leurs obligations légales et restaient léthargiques face à l'urgence de la crise humanitaire à laquelle nous sommes confrontés avec l'arrivée de réfugiés.
Partout des citoyens se lèvent. Des faucheurs d'OGM aux faucheurs de chaises, des enseignants désobeisseurs aux participants à Nuit Debout et aux zadistes, jusqu'aux citoyens solidaires de la Vallée de la Roya. Partout des citoyens rappellent les idéaux démocratiques, font vivre le cœur de la République et défendent les libertés fondamentales envers et contre l'Etat, les élus sensés les représenter, les administrations aveugles s'inventant et imposant leurs propres règles. 
Ces citoyennes et ces citoyens, envers et contre les pouvoirs publics, sont parfois les derniers défenseurs de la démocratie et de la solidarité.
Rappelons donc Élus locaux, Préfet, Procureur, gouvernement et Président de la République au sens des responsabilités. Ne poussez pas les citoyens à l'impasse en laissant pourrir une situation intenable où ils sont seuls et démunis face à une misère et une détresse que vous refusez de prendre en charge et pour lesquelles vous leur interdisez d'intervenir. 
Ce n'est pas en criminalisant la solidarité que vous réglerez le problème : de l'écoute, du dialogue, des solutions constructives et équilibrées et un véritable volontarisme politique pour que la France soit à la hauteur de la France, pays des droits de l'Homme et du citoyen, voilà ce dont nous avons besoin.

Pour suivre l'actualité et soutenir les citoyens solidaires du 06 : https://citoyenssolidaires06.com/

vendredi 30 décembre 2016

Non, M. Ciotti ne peut être Président du Conseil Départemental des Alpes-Maritimes

Comme le Préfet Leclerc avant lui, Eric Ciotti perd ses nerfs et déverse sa colère et son extrême agitation dans les colonnes de Nice Matin. Il y signe une diatribe rageuse suite à l'élection par les lecteurs du journal de Cedric Herrou comme "Azuréen de l'année". Occasion pour le député d'entretenir un amalgame coupable entre menace terroriste et accueil des migrants.

Comme le Préfet Leclerc avant lui (lire ici), Eric Ciotti perd ses nerfs et déverse sa colère et son extrême agitation dans les colonnes de Nice Matin, où il signe une diatribe rageuse.
Avant même de poursuivre, témoignons ici notre compassion à l'égard de l'équipe de rédaction dudit journal, qui doit vivre dans l'angoisse quotidienne de la réception d'une nouvelle tribune courroucée d'une autorité locale hyperactive.
Venons-en au fait : le quotidien publie en ligne un sondage pour élire l'azuréen de l'année. Parmi ceux-ci figure Cédric Herrou, citoyen solidaire qui est venu en aide aux migrants dans la vallée de la Roya. Et là, catastrophe : des citoyens, lecteurs du journal en ligne, plébiscitent la solidarité. Cédric Herrou est élu "azuréen de l'année" par 55% des suffrages, soit 4257 voix sur 7677.
Oh rage ! Oh désespoir ! Oh presse libre, traîtresse ennemie ! Quoi ? Comment ? Est-ce vraiment possible ? Un suffrage échapperait donc à tout contrôle dans les Alpes-Maritimes ?
Eric Ciotti vocifère et lance uns à uns tous les amalgames possibles, même si répondre à chacun serait ici trop long : 
Non, M. Ciotti, tant que M. Herrou n'a pas été jugé, il est présumé innocent (et vous avez vous-même rappelé ce principe quand vous souteniez un certain candidat aux nombreuses affaires en cours).
Non, M. Ciotti, les actions des citoyens solidaires ne constituent pas des insultes aux forces de l'ordre, et de nombreux gendarmes, policiers et militaires font preuve de bien plus d'humanité que vous.
Non, M. Ciotti, un migrant souhaitant demander l'asile n'est pas dans l'illégalité et il ne le sera que s'il demeure sur le territoire national après refus de sa demande d'asile.
Non, M. Ciotti, le Conseil Départemental dont vous êtes le Président n'assume pas ses obligations légales de prise en charge des mineurs isolés relevant de la protection de l'enfance.
Non, M. Ciotti, ce n'est pas parce que des djihadistes ont pu s'infiltrer parmi les réfugiés que la France doit renoncer à sa politique d'hospitalité et bafouer les conventions internationales qu'elle a ratifiées. Faire un amalgame volontaire entre secours porté aux migrants et menace terroriste est indigne d'un élu de la Nation. 
Non, M. Ciotti, la solidarité n'est pas un délit. La solidarité est un geste naturel de l'homme, mû par une empathie innée qui le pousse à aider son prochain. Certains expliquent cela par une approche anthropologique, d'autre par un discours religieux consistant à aimer son prochain comme soi-même, d'autre encore appellent cela d'un nom pour vous étrange et inquiétant : l'humanisme.
Vous ponctuez votre texte d'un "Non, M. Herrou ne peut pas être l'Azuréen de l'année" niant ainsi le vote qui a eu lieu.
Alors non, M. Ciotti ne peut pas être député de la Nation. Non, M. Ciotti ne peut pas être Président du Conseil Départemental des Alpes-Maritimes. Non, puisque l'on peut apparemment passer outre les suffrages exprimés et nier la réalité, je déclare que M. Ciotti, compte tenu de son inaptitude fondamentale à comprendre ce qui fait l'humanité du genre humain ne peut, en aucun cas et d'aucune manière, nous représenter.
L'article annonçant l'élection de Cédric Herrou comme "azuréen de l'année" (Nice Matin, 29.12.2016) : 
La réponse d'Eric Ciotti (Nice Matin, 30.12.2016) :

jeudi 22 décembre 2016

Vieillesse et précarité à Nice: il y a urgence !

Nice a un taux de pauvreté deux fois plus élevé que la moyenne nationale. C’est la 4ème des 100 plus grandes villes de France ayant le plus de personnes âgées parmi les personnes vivant sous le seuil de pauvreté. Il y a urgence. Le silence et l'indifférence règnent pourtant sur cette question. Mais rien de grave, cette année encore, nous élirons notre «stars senior» et notre «super mamie»...


Alors que la Ville de Nice conserve encore, vue de l’extérieur, une image de richesse et de vie facile, la précarité y est très importante et une catégorie de Niçois en souffrent particulièrement : les personnes âgées.

A Nice, de plus en plus de personnes âgées ne peuvent se soigner faute d’argent, mendient ou font les poubelles pour se nourrir.

De très nombreuses familles sont confrontées à l’épineuse question de la dépendance des personnes âgées et ne parviennent pas à placer leurs parents ou grands-parents dans des maisons de retraites ou des EHPAD.

Ces constats quotidiens sont confortés par une estimation récente, menée par le bureau d’étude Compas, qui a réalisé une comparaison des taux de pauvreté et une typologie des personnes vivant sous le seuil de pauvreté dans les cent plus grandes villes de France métropolitaine.

100 500 Niçois vivent sous le seuil de pauvreté (1000 € par mois), ce qui représente 28,5% de la population, soit 7% de plus que Paris (21,5%) et… le double de la moyenne nationale (14,5%) !

Nice est classée par l’étude dans la catégorie « C » : "Pauvreté élevée / sur-représentation des couples sans enfant et des ménages âgés parmi les personnes pauvres".

En effet, Nice présente un des plus forts taux de personnes âgées (8,6%) parmi les personnes pauvres. Seules Ajaccio (12%), Antibes (11,5%) et Cannes (10,1%) font pire.

Alors que plus de 8600 personnes âgées vivent sous le seuil de pauvreté à Nice, la question ne semble être la priorité ni du Conseil Départemental ni de la Ville de Nice, pourtant en charge des aides extra-légales aux personnes âgées.

Communiquer sur la « Silver économie », organiser chaque année le concours de « super mamie » ou la très médiatisée « Star Senior » sont sûrement de très bonnes choses, fermer les yeux devant le phénomène inquiétant de précarisation croissante des personnes âgées en est une autre.

Nice présente un taux de pauvreté deux fois plus élevé que la moyenne nationale. C’est la quatrième des cent plus grandes villes de France métropolitaine ayant le plus de personnes âgées parmi les personnes vivant sous le seuil de pauvreté. La situation est alarmante. L’indifférence et le silence règnent pourtant sur cette question.

Il ne fait pas bon vieillir à Nice. Mais ce n’est pas grave, l’an prochain, la Star Senior fera sûrement des claquettes…

Source de l'étude : Pauvreté et types de ménages : une typologie des intercommunalités

jeudi 8 décembre 2016

Délit de solidarité : la réponse du Préfet Leclerc, le déshonneur de l'Etat

Entre soutien politique à Eric Ciotti et tentative pour influencer les juges dans les affaires de délits de solidarité en cours, le nouveau Préfet des Alpes-Maritimes signe un texte polémique, méprisant et insultant. Il s'en prend à l'historien Yvan Gastaut et s'avère inapte à comprendre les actions citoyennes d'entraide, de solidarité et d'humanisme qui font pourtant honneur à notre pays.

Un préfet incarne l'Etat et doit faire preuve, en toutes circonstances, de sang froid, de discernement et de hauteur de vue. Le nouveau Préfet des Alpes-Maritimes, Georges-François Leclerc, fraîchement arrivé dans notre département, n'échappe pas à la règle. 
Il vient pourtant de prendre la plume dans Nice Matin, pour signer une violente diatribe en réponse à une tribune libre de l'historien Yvan Gastaut, publiée dans le même quotidien local (voir les deux textes en fin d'article). Le Maître de conférences niçois y dressait l'historique de la longue tradition de solidarité dans la Vallée de la Roya jusqu'aux gestes d'humanité récents des citoyens venant au secours de réfugiés ayant passé la frontière italienne. 
La réponse du Préfet est celle d'un homme impatient et imprécis, visiblement excédé, sortant de la neutralité de l'Etat pour alimenter une polémique aux arrières plans politiques évidents. Il vole au secours du Président du Conseil Départemental, Eric Ciotti, en assurant que ce dernier respecte bien ses obligations légales et prend en charge les mineurs isolés, niant ainsi l'évidence que tous constatent sur place. Mais, plus grave encore, prétextant  une réponse à l'historien, il porte la position de l'Etat sur la place publique et tente ainsi d'influencer les juges dont les délibérés sont attendus début janvier dans les procès de deux citoyens désobeisseurs, Cédric Herrou et Pierre Alain Mannoni (lire ici).
Passons rapidement sur le ton méprisant, l'outrance et les inexactitudes du propos : non, Monsieur le Préfet, l'analyse de l'historien, qu'elle vous plaise ou non, ce n'est pas "n'importe quoi". Non, Monsieur le Préfet, ce n'est pas parce que l'on décrit une réalité que vous ne voulez pas admettre qu'il y a "imposture" ou "injure". Non, Monsieur le Préfet, critiquer les règles de droit injustes que vous défendez ne veut pas dire manquer de respect ou dénigrer les fonctionnaires qui les appliquent. Non, Monsieur le Préfet, lorsqu'il agit par humanité et quand bien même cette humanité le pousse à la désobéissance, cela ne veut pas forcément dire que le citoyen est "manipulé". Non, Monsieur le Préfet, la solidarité n'est pas un délit, quand bien même elle montre au grand jour votre propre inaction et vos propres carences.
Car s'il y a des désobeisseurs dans la vallée de la Roya et plus généralement dans les Alpes-Maritimes, c'est avant tout pour pallier à l'inaptitude de l'Etat à faire face à la crise humanitaire majeure à laquelle nous sommes confrontés. De simples citoyens agissent là où l'Etat ne fait rien. Ils secourent d'autres être humains en périls, des personnes ayant fui des pays en guerre, traversé une partie du Sahara, la méditerranée, l'Italie, la frontière italo-française par les chemins de montagne et errent sur les routes, démunis, en ce début d'hivers.
Une jeune réfugiée a été blessée cette semaine en tentant de traverser l'autoroute pour passer la frontière. Trois personnes ont déjà trouvé la mort dans des circonstances similaires. Combien faudra-t-il de drames pour que vous réagissiez enfin, Monsieur le Préfet, au lieu de vous perdre en vaines polémiques ? L'exemple de Calais ne vous a-t-il donc rien appris ?
Et dire que ces actes de secours, envers et par delà des lois iniques, nous rappellent les actes des "Justes parmi les Nations" ne veut pas dire que l'on compare l'incomparable, que la République française soit assimilée au Régime de Vichy, ni que l'Italie d'aujourd'hui soit semblable à celle de Mussolini. Bien évidemment les désobeisseurs d'aujourd'hui risquent des amendes et quelques mois de prison quand les "Justes" d'hier risquaient la déportation et la mort. Mais le geste d'humanité de ces citoyens qui bravent l'interdit pour secourir ceux qui sont en danger, quand bien même le contexte est différent et les risques encourus sont moindres, est au fond de même nature.
Ces gestes d'humanité, Monsieur le Préfet, faits par de simples citoyens, sont l'essence même de notre grande Nation qu'est la France, terre de liberté et de fraternité. Ils perpétuent cette tradition de solidarité dont nous sommes fiers. Ils font battre le coeur de cette si belle République dont, par votre dogmatisme et votre mépris, vous faites aujourd'hui le déshonneur.
L'article d'Yvan Gastaut (Nice Matin, 29.11.2016) :
La réponse du Préfet Leclerc (Nice Matin, 07.12.2016) :

jeudi 1 décembre 2016

Le triple échec de François Hollande

Échec de la politique économique et sociale menée, du pacte de responsabilité à la loi El Khomri, atteintes au socle démocratique et à l'équilibre des pouvoirs en France, incapacité à rassembler les Français et à consolider l'unité nationale face aux attentats, la non candidature de François Hollande est la conséquence logique du triple échec de son quinquennat.


Nous ne devons pas nous laisser duper par un jeu d'acteur de 10 mn, fut il très bon. Nous devons au contraire regarder avec lucidité ce qui a été fait et ce qui n'a pas été fait durant quatre ans et demi.

Le quinquennat de François Hollande s'achève sur un triple échec 

Tout d'abord un échec économique et social cuisant : outre le non-respect des engagements de campagne (lutte contre le monde de la finance, renégociation des traités européens, etc. ), une politique de l'offre désastreuse avec 41 milliards d'euros versés aux entreprises sans contreparties en termes de créations d'emplois dans le cadre du pacte de responsabilité, une précarisation croissante de pans entiers de la population, notamment des personnes âgées, etc., et je ne reviens pas sur la loi Macron, la loi El Khomri ou la réforme des rythmes scolaires.

Ensuite des atteintes sans précédent au socle démocratique de notre pays et à l'équilibre des pouvoirs en France : un pouvoir judiciaire en retrait avec la loi renseignement et la prolongation de l'état d'urgence, un pouvoir législatif bafoué avec le recours répété au 49.3, sans parler de la tentative de rupture de l'égalité républicaine avec la déchéance de nationalité ou de la gestion inhumaine des migrants.

Enfin, face à la barbarie des attentats et aux terribles drames qui ont frappé notre pays, François Hollande n'a pas su rassembler les Français et n'a pas su consolider l'indispensable unité nationale. Il a divisé, il a remis en question les libertés fondamentales dont l'Etat est pourtant garant, il a amoindri l'image de la France dans le monde.

A tous ceux qui nous disent que ce sera pire si François Fillon ou Marine Le Pen gagne l'élection présidentielle et qu'en comparaison François Hollande apparaîtra comme un bon président aux yeux de l'Histoire je réponds oui, à l'évidence ce sera bien pire, mais si une majorité de Français ne voient d'alternative qu'en une droite extrême ou une extrême droite, c'est aussi parce que la politique menée par François Hollande n'a su redonner ni confiance ni espoir en un avenir commun.

Le bilan du quinquennat de François Hollande s'avère donc néfaste pour la gauche, pour la France et surtout pour les innombrables personnes en souffrance dans notre pays.