jeudi 18 juillet 2019

Légitimer les violences policières, une stratégie irresponsable

Christophe Castaner a décoré les gradés responsables des violences policières récentes. Au lieu d'appeler à la retenue, il donne une prime à la violence. Au lieu d'attendre le résultat des enquêtes en cours, il passe outre l'autorité judiciaire. Au lieu de promouvoir l'unité nationale, ce gouvernement rompt toute confiance possible entre le citoyen et l'Etat.

Nous assistons depuis plusieurs mois à des violences policières sur des militants pacifistes, totalement injustifiées, totalement abjectes. Si le ministre de l'intérieur garantissait, au début du conflit des Gilets Jaunes, savoir distinguer les dangereux casseurs et les Black Blocs des manifestants "légitimes" et "bon enfants", les faits montrent à l'inverse des violences commises par la police contre des personnes ne constituant pas une menace pour l'ordre public, ce qui est le cas de Geneviève Legay à Nice ou des écologistes gazés sur le pont de Sully à Paris et, bien évidemment, des jeunes gazés lors de la fête de la musique à Nantes.

Christophe Castaner vient, au nom de la France, de décorer de la médaille de la sécurité intérieure les gradés responsables des principales violences policières récentes dans une "exceptionnelle promotion Gilets Jaunes 2018-2019."

Cet acte constitue une véritable prime à la violence qui, au lieu d'appeler les forces de l'ordre à la retenue, laisse libre court à toutes les dérives. Il officialise également, puisque plusieurs de ces violences font l'objet d'enquête judiciaires en cours, une atteinte délibérée à la séparation des pouvoirs et l'autorité judiciaire en France. Enfin, en légitimant les violences policières, il acte une rupture grave du pacte républicain qui unit citoyens et gouvernants et symbolise l'avènement d'un pouvoir liberticide.

1. Une prime à la violence

Nos forces de l'ordre sont à bout, elles sont épuisées. Les suicides de policiers, de plus en plus nombreux, dramatiques, sont la partie visible de l'iceberg. Les actes de violences policières commis par certains nuisent à l'ensemble de la profession et en donnent une image déplorable, à l'opposé du devoir de protection qui est au cœur de leurs missions. Décerner une médaille aux gradés responsables d'actes de violences policières comme au commissaire Rabah Souchi à Nice, c'est valider la réponse répressive disproportionnée, c'est cautionner une violence policière non contrôlée, les excès, les abus et les fautes professionnelles. Cette véritable prime à la violence est un acte profondément irresponsable de la part du gouvernement qui devrait au contraire appeler les policiers à la mesure et à la maîtrise. Ce faisant, il nuit à l'ensemble des forces de l'ordre en leur retirant le crédit et la confiance de la population.

2. Une atteinte à la séparation des pouvoirs

De nombreux actes de violences commis sous l'autorité de gradés qui viennent d'être décorés au ministère font l'objet d'une procédure judiciaire en cours. La posture habituelle du gouvernement est d'attendre que justice soit faite pour récompenser ou blâmer ensuite ses agents. Les décorer sans attendre le verdict de la justice, c'est porter délibérément atteinte à l'autorité judiciaire, c'est empiéter volontairement sur la séparation des pouvoirs en France. Si l'un de ces gradés est condamné dans les semaines ou les mois à venir, le ministère lui retira-t-il sa médaille ? Pourquoi ne pas tout simplement attendre que les jugements soient rendus ? La réalité est tellement simple qu'elle en est déconcertante : ce gouvernement fait fi de la séparation des pouvoirs, il fait fi de la justice, il fait fi de l'opinion. Il réduit la réponse républicaine à une répression aveugle et récompense ceux qui l'ont mise en œuvre.

3. Une rupture républicaine

En légitimant les violences policières, le gouvernement pousse à une rupture totale entre le citoyen et l'Etat. Il brise tout lien de confiance possible du citoyen envers ceux qui incarnent le pouvoir. Cette défiance du citoyen, alimentée sciemment par le ministre de l'intérieur, a des répercussions dont nous ne pouvons encore mesurer l'impact, notamment sur la jeunesse. Et l'on s'étonnera ensuite du taux d'abstention et du refus d'une partie de la population de cautionner un système que le gouvernement décrédibilise lui-même !

Ajoutée au mépris réitéré du Président envers les plus faibles à grand coups de petites phrases assassines, cette violence récompensée vient parachever le sentiment qu'il est inutile et vain de vouloir participer à la chose publique, à la République elle-même. L'appartenance à une communauté nationale n'est en effet pas envisageable sans équité ni justice. L'impunité des auteurs et commanditaires de violences policières rend impossible, pour beaucoup, toute adhésion à la communauté nationale.

Adossé à ces actes de répression, un dispositif législatif entérine des atteintes au droit de manifester et aux libertés individuelles et acte un véritable tournant liberticide du quinquennat. Le pouvoir macronien conforte l'idée d'un pouvoir au-dessus des lois, autoritaire, n'apportant comme réponse à la colère populaire qu'une répression aveugle et bafouant, de fait, l'idéal démocratique de la France.

Le président de la République, son gouvernement et sa majorité, devenus irrémédiablement irresponsables, rendent impossible toute unité nationale. 

mardi 16 juillet 2019

Mineurs isolés : quand faire des économies rime avec mise en danger

 Communiqué de presse du 10 juillet 2019 de l'association "Tous citoyens !" :

Mineurs isolés : quand faire des économies rime avec mise en danger

"Les tensions et violences survenues au foyer pour mineurs isolés étrangers les Pins, à Valbonne, sont la conséquence directe de choix économiques : pour dépenser moins, le Département 06 a choisi d'ouvrir une structure trop grande de 100 lits qui entrave le suivi personnalisé et la prévention des conflits. Une telle structure favorise la mise en danger physique et psychologique du personnel comme celle des jeunes.

L'accompagnement des jeunes exilés nécessite des structures plus petites de 30 à 40 lits maximum, du personnel diplômé et formé en nombre suffisant. Ces mineurs ayant souvent subi des violences et des actes de torture, un suivi psychologique adapté et constant est indispensable. 

La répartition géographique de ces foyers doit également être pensée à l'avance. En effet, ces jeunes sont quasiment tous orientés vers de l'apprentissage. Or concentrer une centaine de jeune au même endroit revient à saturer de demandes les patrons proches acceptant des apprentis et à obliger les jeunes à rechercher des contrats d'apprentissage de plus en plus loin. 

Nous préconisons en conséquence une répartition des mineurs isolés dans des petites structures situées près des centres de formation et des bassins d'emplois potentiels.

Afin d'éviter des oppositions de maires ou de riverains, comme à Saint Agnès, nous préconisons un travail en amont, pour ne pas mettre la population et les élus locaux devant le fait accompli. Il s'agit de concevoir l'accueil de ces mineurs en accord avec la population, les élus et les associations locales et nous invitons le Département et la Préfecture à la concertation et au dialogue préalables.

La prise en charge de ces jeunes en souffrance connait de nombreuses carences quant aux conditions de mise à l'abri, aux modalité d'évaluation de minorité et aux premiers mois de placement. Mais le processus d'intégration, une fois véritablement lancé, se passe souvent de façon très positive. Les éducateurs, les centre de formation pour apprentis, les lycées professionnels et les entrepreneurs leur donnent une nouvelle chance et nous sommes témoins de belles réussites.

Il est regrettable que le choix d'un accueil au plus bas coût vienne entraver les efforts conjugués de jeunes exilés qui font tout pour s'en sortir et de l'ensemble des acteurs qui leur viennent en aide, au risque d'une mise en danger des jeunes et du personnel encadrant.

Or les arbitrages budgétaires révèlent une priorisation des actions à mener et, au fond, relèvent de décisions politiques et bien souvent idéologiques. Nous ne pouvons que rappeler le Président du Département et le Préfet des Alpes-Maritimes à leurs obligations légales de protection, de soin et d'éducation des mineurs isolés étrangers ainsi que de protection du personnel encadrant."

L'association "Tous citoyens !"

jeudi 13 juin 2019

Nice, ceci n'est plus une fête (de la musique)

Pour un soir de fête, on coupe la ville en deux et on pénalise les usagers du tram durant onze jours. Pour un concert retransmis à la télévision, on oublie le sens de la fête de la musique, sa richesse et son éclectisme, son déploiement dans tous les quartiers de la ville, son esprit de découverte et de liberté.

Nous aimons tous la fête de la musique et le carnaval, mais quelle est cette idée étrange d'organiser systématiquement l'événementiel niçois Place Massena, de bunkeriser la place, de couper la ville en deux et, au final, de faire perdre à ces fêtes leur esprit initial ?

Le carnaval, fête populaire et intempestive, a été peu à peu aseptisé, commercialisé, ultra-sécurisé et au final dénaturé (lire ici). Le festival de jazz, le festival du livre et les autres événements, sous couvert de sécurité, sont devenus des lieux fermés, ultra contrôlés. D'horribles palissades noires s'imposent régulièrement à Nice, brisant l'esthétique de la ville. A force de vouloir réduire la culture, le sport et les fêtes populaires à de l'événementiel, à force de vouloir tout contrôler, la Ville de Nice fait perdre leur sens et leur spécificité à ces moments de partage qui rythment notre vie locale. La place Massena et la promenade du Paillon, lieux de vie et d'échanges, deviennent des plate-forme événementielles permanentes. Et la colline du Château, sous couvert de réaménagement, risque de subir le même sort. 

La fête de la musique 2019 reproduit les travers de la municipalité : pour un soir de fête, le 21 juin, on coupe la ligne 1 du tram en 2 durant 11 jours, du 13 au 24 juin inclus, obligeant les usagers du tram à descendre pour le reprendre de l'autre côté de la place. On bunkérise le centre ville en rendant la place Massena inaccessible. On retire 23 bancs de 2 tonnes chacun. On cimente leur emplacement. On les entrepose temporairement ailleurs pour les réinstaller ensuite, la Ville de Nice refusant de communiquer le coût de la manœuvre. 

Ce type de décisions ne peut être pris que par des personnes utilisant la voiture et non les transports en commun, préférant leur passage sur une télévision nationale au quotidien des niçois.

On installe une scène place Massena alors que le Théâtre de Verdure est si proche et que l'on peut monter une seconde scène sur la coulée verte comme pour le festival de jazz. Là encore, silence de la Ville sur le coût de cette installation...

Concentrer les efforts financiers de la Ville sur un grand concert parce qu'il est retransmis à la télévision revient à réduire le déploiement de la fête dans les autres quartiers de la ville. Et si l'on tient à ce concert télévisé pour la publicité indéniable qu'il procure à la Ville, il est possible de le conserver sans concentrer la fête place Massena. Les têtes d'affiches qui font le déplacement souvent pour un seul ou deux morceaux pourraient être réparties sur différentes scènes, à différents endroits de la ville, la retransmission passant d'une scène à l'autre. Cela éviterait de saturer le centre ville et cela permettrait à leurs fans de bénéficier de réels concerts de leurs artistes préférés.

Organiser un grand concert gratuit est une bonne chose et c'est l'esprit de la fête impulsée par Jacques Lang. Mais la fête de la musique est bien plus que cela. Nous prenons tous plaisir à déambuler dans les rues de Nice, à découvrir de petits groupes au détour d'une place. Les styles musicaux se mélangent, loin du formatage télévisé. De jeunes musiciens jouent en public, souvent pour la première fois. La fête de la musique est la fête de toutes les musiques, de tous les musiciens, de tous les amoureux de musique.

La musique, qu'elle soit jouée au quotidien par des artistes de rue ou qu'elle soit fêtée le 21 juin, échappe à l'insatiable volonté de contrôle des pouvoirs publics locaux. La fête de la musique, à Nice comme ailleurs, doit rester un événement populaire et laisser place à l'imprévu, à la découverte, et à la liberté.

vendredi 17 mai 2019

Création de l'Observatoire des droits et libertés dans les Alpes-Maritimes

L'association "Tous citoyens !" se joint à plusieurs partenaires pour créer l'Observatoire des droits et libertés 06. N'hésitez pas à diffuser le plus largement possible cette information, et, le cas échéant, à nous signaler toute atteinte aux droits et libertés dans notre département entrant dans le périmètre de l'Observatoire...


Observatoire des droits et libertés 06   

Les atteintes aux libertés constatées dans le département des Alpes-Maritimes, qu’elles soient le fait de l’Etat et ses représentants ou des collectivités locales ou qu’elles soient la conséquence de leurs carences, augmentent sans cesse.

Une réponse collective s'impose : c’est la création d'un "Observatoire des droits et des libertés dans les Alpes-Maritimes".

Cet observatoire, porté par la LDH, le MRAP et le Syndicat des Avocats de France, avec l'appui, dès à présent, des associations locales ADN et Tous citoyens … , interviendra sur les cas de violences policières, interdictions et agissements contraires aux principes fondamentaux des droits, notamment le droit de manifestation, de réunion, d’expression, d'aller et venir, les individus agressés pour leurs actions ou leurs mobilisations, les personnes victimes de discriminations pour leur appartenance supposée ou réelle à un groupe donné et toute personne privée de ses droits fondamentaux. Le périmètre d’intervention de l’observatoire est susceptible d’être modifié, en fonction des informations recueillies et des réalités du terrain.

Sont exclus du périmètre les litiges entre individus ou les cas individuels tels que hospitalisations sans consentement, litiges liés aux tutelles et curatelles ou en lien avec le droit du travail ou le statut de la fonction publique, dès lors qu’ils peuvent être disjoints de ce qui est indiqué au paragraphe précédent. S’agissant des atteintes aux droits des étrangers qui sont de longue date dénoncées par plusieurs organismes ou collectifs locaux, elles leurs seront, si l’Observatoire devait en être saisi, immédiatement transmises pour traitement. L’observatoire, si nécessaire, collaborera avec ces collectifs.

L’observatoire se donne les objectifs suivants :

- Collecter les informations - Organiser des équipes d’observation : manifestations, tribunaux, etc. - Analyser les informations collectées, leur pertinence et leur fiabilité

Le cas échéant, l’observatoire décidera des suites à donner, seul ou en liaison avec d’autres organismes : classer, signaler au procureur, au Défenseur des Droits, à la CNIL, agir devant les tribunaux, médiatiser, etc.

L’observatoire met à la disposition du public, des associations, syndicats et groupements politiques :

· Une adresse mail sécurisée : obslibertes06@protonmail.com
· Une messagerie téléphonique : 07 81 40 01 18
· Une adresse postale : SAF – Observatoire- Maison de l’avocat 15, rue Alexandre Mari 06300 Nice

mardi 9 avril 2019

Cinq mesures indispensables dans l'affaire Geneviève Legay

L'affaire Geneviève Legay cumule les plus invraisemblables manquements au droit. L'association "Tous citoyens" propose 5 mesures indispensables pour faire émerger la vérité et restaurer un minimum d'éthique.

Communiqué de presse de l'association "Tous citoyens !"

"Cinq mesures indispensables dans l'affaire Geneviève Legay"


L'affaire Geneviève Legay cumule les plus invraisemblables manquements à l'éthique et au droit :

- Le maire de la 5ème ville de France, Christian Estrosi, prétextant d’un appel incertain sur les réseaux sociaux, voulant absolument apparaître comme le dernier rempart face à des hordes de casseurs, continuant à alimenter les peurs, demande une interdiction totale de manifester dans sa ville ;

- Le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, déjà porteur d’une loi portant atteinte à la liberté de manifester et à la séparation des pouvoirs, accepte sur le champ cette demande ;

- Le Préfet des Alpes-Maritimes, Georges François Leclerc, impose une interdiction de manifester couvrant entièrement la ville alors que les manifestations de Gilets Jaunes s’y sont jusqu’alors déroulées sans violences ;

- Le commissaire Rabah Souchi, donnant ordres sur ordres, créant désordre et confusion, sonne la charge sur des manifestants pacifistes, causant ainsi la chute et les blessures graves d’une militante altermondialiste de 73 ans, Geneviève Legay ;

- L'enquête sur les agissements de ce même commissaire est confiée à sa propre compagne, Hélène Pédoya, constituant un conflit d’intérêt évident, tellement énorme qu’on a du mal à y croire, mais qui ne choque absolument pas le procureur de la République ;

- Le procureur en question, Jean-Michel Prêtre, et le Président de la République, Emmanuel Macron, affirment tous deux, alors même que l’instruction de l’enquête n’est pas terminée et que les images ne sont pas toutes collectées, que la victime n’a pas été poussée par un policier ;

- Des enquêteurs tentent, à trois reprises, d’obtenir un témoignage en faveur des forces de l’ordre auprès de la victime alors qu’elle est à demi consciente et sur son lit d’hôpital, constituant ainsi une tentative de subornation de témoin répétée et en toute impunité ;

- Le Procureur Jean-Michel Prêtre, encore, refuse le dépaysement de l'affaire demandé par l'avocat de Geneviève Legay.

En conséquence, nous, association "Tous citoyens", estimons que :

1. Le commissaire Rabah Souchi, à propos duquel des témoignages nombreux et alarmants affluent, devrait être suspendu de ses fonctions jusqu'à la fin de l'enquête.

2. Le Procureur de la République, Jean-Michel Prêtre, n'est plus à même de faire émerger la vérité et que le dépaysement de l'affaire devrait être immédiat.

3. Le Préfet des Alpes-Maritimes, Georges-Francois Leclerc, déjà condamné à plusieurs reprises pour atteinte au droit d'asile et à la protection de l'enfance, responsable du dispositif sécuritaire mis en place le 23 mars à Nice, devrait être révoqué.

4. Le Ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, incapable de gérer la crise des Gilets Jaunes et dont les consignes ont causé un nombre important de blessures et de mutilations devrait avoir la dignité de présenter sa démission, et, qu'à défaut, le Premier Ministre devrait le relever de ses fonctions.

5. Le Président de la République, Emmanuel Macron, devrait "faire preuve d'une forme de sagesse", présenter ses excuses à Geneviève Legay et mettre fin au système répressif et liberticide qu'il a mis en place en France.

vendredi 29 mars 2019

Nouvelle interdiction de manifester à Nice : le Préfet souffle sur les braises

Le Préfet des Alpes-Maritimes annonce une nouvelle interdiction de manifester à Nice, certes restreinte, mais inutile. Bon macronien, totalement irresponsable, il souffle sur les braises...


Communiqué de presse de l'association "Tous citoyens !"

Nouvelle interdiction de manifester à Nice : le Préfet des Alpes-Maritimes souffle sur les braises

"Geneviève Legay est à l'hôpital dans un état grave. Des preuves et des témoignages alarmants et concordants sur des violences policières commises à Nice le week-end dernier et sur la direction des opérations par le commissaire Rabah Souchi affluent. Des plaintes ont été déposées et sont en cours de traitement.

C'est dans ce contexte tendu qu'une nouvelle interdiction de manifester à Nice est annoncée, afin de "protéger l'attractivité commerciale et touristique de la ville". Cette interdiction, certes restreinte et ne concernant pas les deux points de rendez-vous annoncés pour samedi 30 mars, est inutile et infondée : les Gilets Jaunes n'ont jamais manifesté dans le Vieux Nice, l'argument commercial ne tient pas puisqu'il y a des commerces également dans les zones non interdites, l'argument touristique ne tient pas puisque la promenade des Anglais n'est pas interdite...

Que peut donc motiver Georges-François Leclerc, Préfet des Alpes-Maritimes, si ce n'est, irresponsable, la volonté d'entretenir un rapport de force dangereux ?

Quel sens donner à cette interdiction si ce n'est, bon macronien, le réflexe de souffler sur les braises de la colère sociale ?

Nous rappelons notre droit à manifester, expression citoyenne légitime.

Nous condamnons cette surenchère qui risque de s'avérer lourde de conséquences, entretenue par celui-là même qui est sensé être le garant de l'ordre public."

L'association "Tous citoyens !"

mercredi 27 mars 2019

Geneviève Legay : un arrêté si bien caché

Quelques instants avant de subir la charge des forces de l'ordre qui a causé sa chute, Geneviève Legay déclarait à la presse "l'arrêté, on l'a pas vu". L'arrêté préfectoral interdisant toute manifestation à Nice est, effectivement, si bien caché sur le site de la préfecture que l'on ne peut que s'interroger sur cette opacité sur un sujet si sensible...

Le samedi 23 mars au matin à Nice, place Garibaldi, lorsque le commissaire Rabah Souchi a donné l’ordre à ses troupes armées de charger, Geneviève Legay est tombée. Nous dénonçons cette charge disproportionnée et inutile puisque Geneviève Legay, comme l’ensemble des manifestants présents, ne présentaient aucune menace : ni insultes, ni jets de projectiles, ni coups ou actes quelconques de violence.

On nous répond immédiatement : « La manifestation était interdite, elle n’avait rien à faire là ». On nous dit presque « tant pis pour elle ». Sur les réseaux sociaux, des personnes bien intentionnées ajoutent « bien fait pour elle ».

Dans une interview donnée à Cnews, le matin même, Geneviève Legay déclarait : "L'arrêté, on l'a pas vu".

Question : comment savait-on que la place Garibaldi était interdite aux manifestants ce matin là ? 

Le Préfet des Alpes-Maritimes avait annoncé dans les médias, notamment dans l'édition du 22 mars de Nice Matin, que toute manifestation serait interdite sur Nice le 23 mars. 

Question : une déclaration d'un Préfet à la presse vaut elle interdiction ?

La réponse est non. Seul un arrêté préfectoral fait autorité. A titre d'exemple, dans cette même interview à la presse, le Préfet déclare que le port d'un gilet, de quelque couleur que ce soit, sera interdit à Nice le 23 mars. Or d'une part un Préfet ne peut interdire aux citoyens de se vêtir comme ils l'entendent (sauf dissimulation d'identité ou port de signes religieux dans certaines circonstances) d'autre part, cette interdiction n'apparaît pas dans l'arrêté préfectoral qui sera finalement pris. On ne peut donc pas se fier à la seule parole du Préfet des Alpes-Maritimes.

Question : comment un citoyen qui désirait manifester le 23 mars pouvait-il avoir accès à l'arrêté préfectoral interdisant la manifestation ?

Il fallait pour cela se rendre sur le site internet de la préfecture des Alpes-Maritimes. Et que voit-on en "une" du site de la préfecture ? Les mesures prises pour la venue du Président chinois à Nice : un arrêté fermant les gares de Nice Riquier à Monaco, un arrêté interdisant l'accès aux plages, un arrêté interdisant le vol en planeur et un arrêté de fermeture des ports. Rien sur l'interdiction de manifester. On cherche donc sur le site en déroulant les menus proposés et on commence par le menu "actualité". Rien dans les "dossiers de presse". Rien dans la rubrique "communiqué" alors que les mesures prises pour la venue du Président chinois y figurent. On cherche, on tourne, on tente le menu "publications" en se disant qu'un arrêté préfectoral est forcément "publié". On déroule le menu. Rien dans les "annonces légales". En fin de liste, on trouve le "recueil des actes administratifs". On ouvre la page, on clique sur l'année 2019. Puis on teste les "recueils mensuels". Mauvaise pioche. On repart en arrière et l'on tente les "recueils spécifiques". Mauvaise pioche encore. On essaie alors le dernier onglet possible, les "recueils  spéciaux" qui, bien évidemment, ne sont pas "spécifiques"... Dans la liste proposée on ouvre plusieurs recueils avant de trouver le "recueil spécial 54.2019" qui, comme son nom ne l'indique pas, contient bien l'arrêté préfectoral n°2019-253 portant interdiction de manifester le 23 mars 2019 à Nice dans un périmètre englobant la place Garibaldi (voir ici)

Question : à quelle heure cet arrêté a-t-il été mis en ligne ?

Impossible de le savoir, rien ne l'indique sur le site préfectoral. Le journal Libération indique que l'arrêté a été publié autour de 18h30 le soir du 22 mars (lire ici), soit la veille au soir de l'interdiction.

Question : le fait de placer une information déterminante dans un emplacement difficilement trouvable et de la publier très tardivement s'apparente-t-il à un défaut d'information du public ?

Au final, et en sachant que les arrêtés préfectoraux de ce type sont classés dans les recueils spéciaux, il faut aller dans six pages successives avant de trouver le bon arrêté : site de la Préfecture des Alpes-Maritimes / Publications/Recueil des actes administratifs / Année 2019 / Recueils spéciaux / Recueil spécial 54.2019. 

La Préfecture aurait très bien pu placer cet arrêté en première page, comme ceux concernant la venue du Président chinois.

Les juristes diront s'il s'agit ou non d'un défaut d'information. Notons que cela témoigne, à l'évidence, d'une opacité difficilement compréhensible sur un sujet aussi sensible.

Et quand Geneviève Legay déclarait, quelques instants avant de subir la charge des forces de l'ordre, "l'arrêté, on l'a pas vu", on ne peut que lui donner raison.