vendredi 17 juillet 2020

Non à l'interdiction d'accès aux plages de Nice le soir

Après différentes places grillagées, l'interdiction d'accès le soir à la Réserve, l'interdiction d'accès aux bords de quais, voici venue l'interdiction pure et simple d'accéder à la plage les soirs de week-end à Nice. Or interdire, ce n'est pas protéger. C'est pénaliser l'ensemble de la population et ne faire que déplacer le problème. Analyse d'un aveu d'échec sécuritaire.

Le maire de Nice et le Préfet des Alpes-Maritimes veulent interdire l'accès de tous aux plages de Nice, au Port et à la Réserve à partir de 22h les vendredi, samedi et dimanche.

La logique est simple : quelques-uns causent des troubles, on pénalise tout le monde. Au lieu d'assurer la sécurité des Niçois et des touristes au bord de mer, on leur interdit d'y accéder.

Comment une municipalité qui dépense un budget énorme pour la sécurité (90 millions d'euros en 2020), qui est l'une des villes ayant le plus de policiers municipaux et de caméras de vidéo surveillance, peut elle se déclarer par avance incapable de garantir la sécurité sur ses plages et son port ? A quoi sert donc de jouer les "Monsieur muscles politiques" quand on est inapte à protéger ses habitants ?

Le cœur du problème est là : interdire, ce n'est pas protéger.

Interdire l'accès à un lieu public, le clôturer avec des grilles, ne fait que déplacer le problème. Récapitulatif : des groupes de jeunes causent, selon la municipalité, des incivilités à la Réserve. On interdit à tous d'y accéder le soir en posant des grilles le 12 juin. Ces groupes se déplacent au Port et on interdit également à tous, vers le 25 juin, d'y accéder le soir. Ils s'installent ensuite sur les plages de la Promenade des Anglais, on interdit désormais l'accès aux plages pour tous. Et si, demain, ils causent des incivilités dans la vieille ville... on ferme le Vieux Nice ? Jusqu'où ira la logique de l'interdit à Nice ?

Christian Estrosi a grillagé le square Marshall, la place des Cigalusa, la place de l'armée du Rhin ou les marchés du Palais de Justice mais il ne fait à chaque fois que déplacer le problème vers des lieux proches. La culture de l'interdit et des espaces clos est un leurre sécuritaire.

En interdisant à tous d'accéder à l'espace public, Christian Estrosi accroît le pouvoir de nuisance des "fauteurs de troubles" : à cause d'eux et de l'inaptitude des pouvoirs publics, toute la ville est pénalisée. A vouloir systématiquement interdire et clôturer l'espace public, on s'enferme soi-même.

Et que dire des touristes que l'on cherche par tous moyens à faire venir pour sauver l'économie locale maladivement dépendante de la mono activité touristique ? Ils viennent à Nice mais ils ne pourront plus accéder au bord de mer après avoir dîné dans le Vieux Nice ? Quelle image de notre ville leur donne-t-on ?

"Homme libre, toujours tu chériras la mer" écrivait Baudelaire. La mer, c'est la liberté. L'accès au bord de mer provoque un sentiment d'évasion, d'ouverture sur l'immensité, avec toujours une intensité si particulière. La plage est souvent cet endroit à part où l'on s'extrait de l'agitation de la ville, où l'on retrouve les éléments naturels.

L'espace public permet, s'il est aménagé pour cela, de favoriser les échanges, le vivre ensemble et l'inclusion social de tous. En clôturant l'espace public et en interdisant d'y accéder, Nice renonce tout à la fois à développer le lien social, à devenir une ville hospitalière et à garantir la sécurité de tous (lire ici). Elle devient une succession d'espaces clos, un lieu de déshumanisation et de ségrégation anti-SDF. Elle renonce à la politique de prévention qui lui incombe.

De plus, Christian Estrosi et son équipe stigmatisent systématiquement la jeunesse. Anthony Borré, 1er adjoint, déclare, en interdisant l'accès à la plage, "lutter contre les rassemblements de jeunes et faire cesser les troubles liés au bruit. Des amendes seront dressées et les instruments de musique comme les Djembé pourront être saisis" (lire ici). Or être jeune et jouer de la musique entre amis le soir sur la plage est normal et légitime. Aller jouer du djembé sur la plage, c'est précisément s'éloigner des habitations pour ne pas gêner les riverains. La jeunesse doit avoir sa place à Nice et lui opposer systématiquement des interdits ne fera qu'envenimer les choses.

Le bord de mer, comme l'ensemble de l'espace public, doit rester accessible à tous. Il revient aux pouvoirs publics locaux, maire comme préfet, de garantir la sécurité de l'ensemble de la population sans interdire d'accéder à la plage, au port ou à la Réserve. Nous voulons habiter la ville librement, avec humanité, et préserver le vivre ensemble à Nice.

mardi 30 juin 2020

Ecosocialisme municipal

Plutôt qu'une simple "vague verte" ce sont des coalitions de l'écologie et de la gauche qui ont rendu possible la victoire aux élections municipales. Loin des grandes théories, un écosocialisme de bon sens voit le jour. Emmanuel Macron, inapte à appréhender la prise de conscience écologique, incarne un libéralisme économique dont le rejet est le ciment de cet écosocialisme nouveau.

Au lendemain de l'élection d'Emmanuel Macron à la présidence de la République, le "ni droite ni de gauche" faisait fureur dans la presse, laissant croire à certains que les bases idéologiques des partis traditionnels étaient définitivement reléguées aux oubliettes. Je m'étais alors succinctement tracé une ligne de conduite politique simple, fondée sur deux impératifs que je pense plus que jamais d'actualité : écosocialisme et humanisme.

Les avidités des divers protagonistes rendant impossible une union autour de ces deux pôles, nous avons assisté aux Elections Européennes à des listes concurrentes portant des programmes similaires et à de logiques défaites, malgré une percée timide d'EELV.

Aux élections municipales de 2020, une lueur d'espoir apparaît : des coalitions pragmatiques entre gauche et écologie ont permis de faire basculer ou de conserver des grandes villes françaises : Lyon, Paris, Marseille, Bordeaux, Grenoble, etc., partout, des coalitions ont rendu possible la victoire. 

Sans attendre une refondation théorique et l'émergence d'un nouveau courant idéologique, un écosocialisme de bon sens a vu le jour. Là où les commentateurs voient une "vague verte", nous constatons au contraire que c'est la constitution de coalitions, que la tête de liste soit issue des mouvements écologistes ou des partis de gauche, qui a rendu la victoire possible. Or qu'est-ce qui a cimenté ces coalitions ? Les leçons de la crise sanitaire, sociale et économique du Covid-19, l'opposition commune aux méfaits du libéralisme économique, le fait que l'écologie comprenne qu'elle est de gauche.

Dans les villes comme Nice, où les tenants de l'écologie ont déclaré être "ni de droite ni de gauche", point d'union possible et défaite assurée. Le vieux débat du positionnement de l'écologie dans l'échiquier politique national sera ainsi, je l'espère, tranché. Le combat pour l'écologie et le combat social ne font qu'un.

Et quand des décisions pratiques doivent être prises, comme c'est le cas lorsque l'on doit gérer une commune ou une intercommunalité, l'évidence saute aux yeux : la santé publique, la qualité de vie des habitants et la préservation de l'environnement sont incompatibles avec les grands projets urbains favorisant le consumérisme effréné, le surtourisme, l'augmentation constante de la pollution et de la bétonisation, etc.

Et, malgré tous ses efforts de bon communiquant, Emmanuel Macron se révélera toujours inapte à porter la prise de conscience écologique pour cette même raison : il incarne la défense d'un libéralisme économique qui a montré toutes ses limites avec la crise du Covid-19 et dont le rejet cimente l'écosocialisme, l'union de bons sens de la gauche et de l'écologie. 

jeudi 18 juin 2020

Clôturer la ville de Nice, un triple aveu d'échec

Les Cigalusa, la place de l'Armée du Rhin, la Réserve... à chaque grille posée, la Ville de Nice avoue son incapacité à développer le lien social, à devenir une ville inclusive et à garantir la sécurité de tous.

Dès que des incivilités sont signalées de façon répétée dans un lieu de Nice, Christian Estrosi fait clôturer ce lieu et prétend le sécuriser.

Ainsi la place des Cigalusa, le square Mashall ou la place de l'armée du Rhin ont été clôturées, alignant de désespérantes rangées de grilles, enfermant ce qui devrait être des lieux de convivialité. Plus surprenant encore, le fait de clôturer et d'empêcher l'accès à la mer le soir à la Réserve. Parce qu'un groupe d'individus y commettait dégradations et incivilité on empêche tout le monde d'y accéder. Fini les couchers de soleil au bord de l'eau dans l'un des plus beau sites de la ville...

En réalité clôturer Nice constitue un triple aveu d'échec :

1. Un échec du vivre ensemble 

L'aménagement urbain est un levier puissant, aux mains des communes, pour favoriser le lien social. Le vivre ensemble commence par avoir la possibilité de se parler dans l'espace public. De grands boulevards qui ne sont que des lieux de passages font que l'on se croise mais que l'on se parle très peu. Des espaces sans banc ni jardin en bas de tours HLM poussent à se regrouper dans des cages d'escalier ou à "tenir le mur". Une place qui n'était qu'un carrefour de passage peut redevenir un lieu de vie, comme à Garibaldi, dès que l'on commence à y réinstaller des bancs. Les espaces grillagés enlaidissent la ville et empêchent les échanges.

Nice allie traditions et modernité. Elle s'ouvre sur le monde grace au tourisme. Elle ne doit pas devenir une juxtaposition d'espaces clos, une ville fermée et bunkérisée. Seule une ville ouverte peut favoriser le vivre ensemble. En voulant se protéger de l'extérieur on s'enferme soi-même.

En clôturant des parcelles de plus en plus nombreuses d'espace public,  la Ville de Nice renonce à y favoriser le lien social. Elle se révèle inapte à adapter l'espace public pour favoriser les échanges. Chaque espace clôturé est un renoncement au vivre ensemble.

2. Un échec de la société inclusive

Une société "inclusive" doit se développer sans exclure aucune catégorie de la population. 

Or la Ville de Nice prétend choisir qui a le droit d'occuper l'espace public et fait tout pour chasser ceux qu'elle juge indésirables. Elle déploie ainsi, par une série d'actions ciblées, une politique de ségrégation urbaine dont les premières victimes sont les SDF :

- couper l'eau place du Pin l'an dernier pour chasser les sans-abri

- jeter systématiquement les affaires de SDF (cartons, sacs de couchage, etc.) 

- refuser d'installer des toilettes et douches publiques gratuites en nombre suffisant partout dans la ville

- refuser de mener une politique d'hébergement d'urgence et de logement social à la hauteur des besoins 

- ne pas soutenir suffisamment les associations d'aide aux sans-abri et priver de moyens suffisants le CCAS et les travailleurs sociaux

- poser une double rangée de grilles devant le Palais de Justice pour chasser les SDF et rendre inaccessibles, un a un, les jardins publics en les clôturant

- etc.

Chaque grille posée, chaque sac de couchage jeté est une négation de l'inclusion sociale, un aveu de rejet et d'exclusion. La Ville de Nice renonce à sa vocation sociale, refuse de devenir une ville hospitalière et mène une politique discriminatoire.

3. Un échec sécuritaire

Pour empêcher des personnes créant un trouble à l'ordre public de se rendre sur un lieu où ils ont leurs habitudes, on grillage le lieu en pénalisant de fait les habitants qui n'y sont pour rien. Mais imagine-t-on un seul instant que les fauteurs de troubles vont gentiment rester chez eux ? Ils vont tout naturellement trouver un autre lieu de rassemblement un peu plus loin et continuer à se comporter de la même manière en génant d'autres riverains. On ne fait que déplacer le problème de place en place. Et quand toutes les places de la ville seront clôturées, les petits groupes convergeront et se regrouperont dans les derniers espaces libres. La Ville de Nice créera ainsi des groupes beaucoup plus nombreux et bien plus difficiles à ramener à la raison et à un comportement respectueux.

Nice est l'une des villes ayant le plus grand nombre de policiers municipaux et de caméras de vidéo surveillance. Elle consacre un budget énorme à la sécurité au détriment du social, de l'éducation et de la santé. Or clôturer une place où ont lieu des incivilités c'est renoncer d'emblée à rétablir l'ordre, c'est avouer à l'avance son incapacité à faire cesser les troubles sans empêcher les riverains d'accéder à cette place. La Ville doit garantir la sécurité des Niçois souhaitant passer une soirée au bord de mer à la Réserve et non leur interdire l'accès.

Chaque lieu clôturé à Nice est un aveu d'échec de Christian Estrosi à garantir la sécurité des Niçois. Il préfère les priver d'accès à ces lieux plutôt que de mener les politiques de prévention et, si besoin, de répression necessaires.

Au final, en posant systématiquement des grilles là où apparaissent des difficultés, la Ville de Nice avoue son incapacité à développer le lien social, à devenir une ville inclusive et hospitalière et à garantir la sécurité de tous.

samedi 13 juin 2020

Symboles publics de corruption, de racisme et d'esclavagisme: l'exemple niçois

La démocratie exerce légitimement son droit d'inventaire et réexamine les symboles de la République. Assumer notre passé permet de ne pas reproduire les erreurs commises et, à tout le moins, de ne pas les ériger en exemples. Or c'est très précisément ce que fait la Ville de Nice célébrant tour à tour des personnalités corrompues, racistes ou esclavagistes.

S'il revient aux historiens d'analyser et d'éclairer les faits historiques, lorsqu'une commune honore et célèbre une personnalité en lui attribuant un nom de lieu, nous entrons dans le champs de la décision politique. 

La République est faite de symboles, ils marquent l'appartenance à une communauté de destins et des valeurs communes, et l'inscription de nos propres actions au sein d'un récit commun. Or nous assistons à une contestation de symboles racistes ou esclavagistes un peu partout en France. La démocratie exerce ainsi, de façon légitime, son droit d'inventaire. Si je ne cautionne pas les actes unilatéraux de destitution d'une statue, il faut entendre la portée symbolique de ce geste politique. 

Dans une démocratie mature, nous devrions être capables de créer les conditions d'un examen posé et concerté du maintien ou non de certains symboles, statues, plaques et nom de rues afin de déterminer s'ils sont toujours en accord avec les valeurs de la République Française. 

Des statues d'esclavagistes, si elles ne doivent bien évidemment pas être détruites, pourraient être exposées dans des musées au lieu de trôner sur la place publique. Ce n'est que l'une des options possibles et nous devrions être en mesure de mener un débat démocratique serein sur cette question qui est loin de n'être que mémorielle. 

Mais, dans l'attente de cet examen du passé et des symboles érigés naguère, il est par contre impensable d'honorer à nouveau des personnalités racistes ou esclavagistes. C'est pourtant ce qu'a récemment fait la Ville de Nice, incurable laboratoire du pire, dont la politique d'attribution des noms de lieux révèle d'un sidérant manque d'éthique :

- Novembre 2018, attribution d'un nom de rue à Charles Pasqua, condamné à 18 mois avec sursis pour financement illégal de campagne électoral et à un an avec sursis pour détournement de fonds en 2010.

- Octobre 2019, inauguration du quai Napoléon 1er. Napoléon Bonaparte qui, outre l'instauration de l'Empire et le très grand nombre de morts dus aux guerres impériales, a notamment rétabli l'esclavage.

- Novembre 2019, inauguration de la rue Jacques Médecin qui, en 1974, a jumelé la ville de Nice avec celle du Cap en soutien à la politique d'apartheid menée en Afrique du Sud, qui a tenu des propos ouvertement racistes ("La France va être envahie par tous les macaques qui n'ont rien d'autre à faire que venir vivre chez nous"), et qui a été condamné en 1992 à un an de prison ferme pour délit d'ingérence, en 1995 à deux ans de prison ferme, cinq ans de privation de droits civiques pour détournements de fonds et trois ans de prison ferme pour corruption et abus de bien sociaux et, en 1998, à deux ans de prison ferme pour fraude fiscale.

- Février 2020, inauguration du cours et de la statue de Jacques Chirac, condamné à deux ans avec sursis en 2011 pour détournement de fonds, prise illégale d'intérêts et abus de confiance et qui a tenu, lui aussi, des propos ouvertement racistes ("le bruit et l'odeur").

On ne peut dans le même temps enseigner l'éducation civique à nos enfants et glorifier, au nom de la collectivité, des personnalités corrompues, racistes ou esclavagistes. Assumer notre passé consiste très précisément à ne pas reproduire les erreurs commises et, à tout le moins, à ne pas les ériger en exemples.

dimanche 7 juin 2020

Élections municipales à Nice et "amnésie" supposée : clarifications

En aucun cas la liste Viva n'a demandé, accepté ou refusé une fusion de liste avec JM Governatori et P Allemand. Si, fait improbable, elle avait accepté une telle fusion, je n'y aurais pas participé. L'éthique d'action demande constance et cohérence.

La liste "Viva ! Démocratie, écologie, solidarité" a fait à Nice, en peu de temps, une très belle campagne et je remercie chaleureusement toutes celles et ceux qui y ont participé. Il nous a manqué 720 voix pour être présents au second tour : ce n'est que partie remise. 

Cette aventure collective rassemblant quatre forces politiques (LFI, PCF, Génération.s et Ensemble) et des citoyens non encartés, au-delà de l'exercice démocratique de la campagne, constitue, je l'espère, l'acte de refondation et l'avenir de la gauche niçoise.

Je pensais ne plus écrire d'article sur cette élection mais le billet d'humeur de Thierry Prudhon publié dans Nice Matin ce jour, bien légitime puisque subsiste une incompréhension, appelle réponse. Notre liste serait devenue "amnésique" et prête à s'allier à Jean-Marc Governatori après l'avoir critiqué durant la campagne. Clarifications :

- Le Collectif citoyen 06 nous a invité à une réunion en vue d'une union au second tour. Nous avons convenu de nous y rendre et que nos représentants à cet échange reviendraient vers nous pour que nous puissions décider collectivement et démocratiquement de la position à adopter. 

- Avant que nous n'ayons eu à prendre cette décision et à voter en interne, nous avons appris que cette union ne serait pas possible suite à un refus de la liste AEI-EELV.

- En conséquence, en aucun cas la liste Viva n'a demandé, accepté ou refusé de fusion ni avec la liste menée par Patrick Allemand ni avec celle menée par Jean-Marc Governatori.

- Je pense que nous aurions refusé mais, respectant nos règles démocratiques internes, je ne peux l'affirmer puisque ce vote n'a pas eu lieu.

- Par contre, opposé à toute fusion de listes, j'avais prévenu mes colistiers et l'ensemble de l'équipe de Viva qu'en cas de fusion je me retirerais et ne participerais ni à une liste ni à une campagne commune.

J'ai décrit les choix politiques nationaux et locaux de Patrick Allemand et Xavier Garcia ici : Etre ou ne pas être de gauche à Nice. J'ai écrit aux écologistes niçois pour leur dire qui était Jean Marc Governatori et quel était le bilan de mandat de Juliette Chesnel et Fabrice Decoupigny ici : Lettre ouverte aux écologistes niçois. Il n'y a aucune amnésie de ma part et en aucun cas je n'aurais renié mes écrits et mes engagements.

Je devrais tout naturellement, face à aux dangers que représentent les politiques défendues par Philippe Vardon et Christian Estrosi, voter pour une liste EELV. Mais, en raison des éléments explicités dans ma lettre aux écologistes niçois citée plus haut, il m'est impossible, d'un point de vue éthique, de voter pour Jean-Marc Governatori. Je voterai donc "blanc" au second tour.

Au-delà de ces péripéties politiciennes imposées, l'urgence sociale, écologique et démocratique est là et appelle mobilisation, éthique d'action et responsabilité. J'y répondrai à mon niveau au sein de "Tous citoyens", de "Viva", et avec l'ensemble des citoyennes et citoyens prêts à s'impliquer pour cela.

jeudi 7 mai 2020

Pour une démondialisation écologique et humaniste

La démondialisation ne doit, en aucun cas et d'aucune manière, pouvoir être assimilée d'une part à un productivisme aveugle contraire à l'écologie et d'autre part à un nationalisme contraire à notre humanisme. La démondialisation sera écologique et humaniste ou elle ne sera pas.

La crise sanitaire, sociale et économique du Covid-19 a fait enfin comprendre à ceux qui s'y refusaient que la France était trop dépendante de ses importations et que, pour faire face aux crises à venir de façon plus efficace qu'elle ne le fait face à celle que nous vivons actuellement, elle devait être plus autonome. Cette autonomie passe par la relocalisation de filières de productions essentielles.

Elle passe également par un renforcement des services publics, notamment hospitaliers, par une préservation des biens communs, par une nouvelle répartition des richesses et par la garantie d'un revenu universel d'existence pour tous sans avoir à improviser des dispositifs compensations sociales partiels et partiaux. J'ai déjà esquissé cela (lire ici) et j'y reviendrai ultérieurement.

Concernant ces fameuses relocalisations de filières industrielles stratégiques devant garantir l'autonomie (de préférence à "indépendance") sanitaire et économique de la France, se pose la question centrale de savoir comment nous concevons cette politique et comment nous la nommons. Resurgissent alors des mots comme "souverainisme", "protectionnisme", "frontière" et, dans un champs lexical proche mais différent, "relocalisation", "circuits courts", "autosuffisance". Entre les deux, un concept que nous sommes nombreux à avoir défendu, notamment avec Arnaud Montebourg depuis 2011 et que nous défendons toujours, sans forcément y entendre tous la même chose : la "démondialisation".

Patriotisme économique, souverainisme et protectionnisme

Le premier champs lexical, de "souverainisme" à "frontières" en passant par "protectionnisme", "made in France" ou "patriotisme économique", permet à certains de rêver d'un dépassement des clivages politiques traditionnels de droite et de gauche en réalisant une union nationale, ces thèmes pouvant séduire les citoyens jusqu'aux électeurs d'extrême droite. Mais la démondialisation ne doit pas aboutir à un repli sur soi chauvin, chaque patriote restant du bon côté de sa frontière, une main sur le cœur, l'autre tendant haut son drapeau et chantant bien fort son hymne national. Certains disent "les Français d'abord", d'autres "America First", mais cela ressort du même creuset.

Pour autant, la patrie n'est pas la nation et être patriote n'est pas une tare ou une faute. Pour autant, sans un protectionnisme qui taxe aux frontières de l'UE les produits fabriqués sans respecter la protection et des travailleurs et de l'environnement, le produit étranger fabriqué ainsi vaudra toujours moins cher qu'un produit européen ou national plus vertueux. Pour autant, la politique du "made in France" et du "redressement productif" menée par Arnaud Montebourg en tant que ministre de 2012 à 2014, de la tentative de renationalisation temporaire de Florange aux 34 plans industriels stratégiques en passant par le décret de mai 2014 limitant l'investissement étranger dans des secteurs clefs, correspond très précisément à la politique qu'il aurait fallu poursuivre pour nous éviter la dépendance actuelle. Tout cela est vrai. Mais la démondialisation ne doit, en aucun cas et d'aucune manière, être assimilable à un nationalisme et il faut se garder d'entretenir la confusion. Même la notion de "souverainisme" renvoie pour beaucoup aux mouvements souverainistes eurosceptiques ou pro frexit. Il s'agit de retrouver un juste milieu et de nous prémunir des extrêmes.

Afin d'éviter ce risque, certains reviennent à la "déglobalisation", le terme de mondialisation étant la traduction française du terme anglais "globalization" et la démondialisation étant une déglobalisation financière et marchande. D'autres relancent la notion, certes intéressante mais elle aussi polysémique et développée en des directions différentes, de "juste échange". Benoit Hamon propose, lui, propose dans un tweet de parler de "démarchandisation", terme qui porte bien l'idée d'extraire les biens communs du système marchand mais qui perd la notion de relocalisation.

Relocalisation, autosuffisance et décroissance

Le second champ lexical, de "relocalisation" à "autosuffisance" en passant par "circuits courts", "territoires résilients", "collapsologie" ou "décroissance", retranscrit bien la nécessité de l'autosuffisance (de préférence à "souverainisme") sanitaire, alimentaire ou énergétique. Il met également l'accent sur la dimension locale et territoriale de la résilience. La notion d'autosuffisance introduit l'idée, en plus de celle d'autonomie, de ne prélever dans la nature et de ne produire que ce qui nous est suffisant. Nous rejoignons là une sobriété qui s'oppose à la surproduction et à la surconsommation. 

La relocalisation n'est pas la renationalisation : niçois, je préfère un produit bio de la Ligurie italienne voisine à un produit gavé d'engrais chimiques et de pesticides du nord de la France. Le circuit court et l'intérêt écologique priment sur les frontières nationales. 

Mais les politiques regroupées dans ce champ lexical se heurtent à des précisions nécessaires sur la productivité. Si nous sommes déjà entrés dans une phase de décroissance subie, si l'arrêt brutal de l'économie durant le confinement évoque l'effondrement, il est indispensable de produire pour relocaliser les filières essentielles à l'autosuffisance. Il faut donc décroître dans certains domaines non essentiels et défendre une croissance raisonnée dans des filières stratégiques ciblées, à définir et à prioriser. Cette indispensable croissance liée à la relocalisation des filières stratégiques ne peut se faire en dépit de l'impératif écologique d'une économie décarbonée, soucieuses de préserver aux maximum nos ressources et d'être le moins polluante possible. Nous devons opérer une mutation profonde de l'Anthropocène telle que nous puissions le transformer de l'intérieur. Et, en aucun cas, la démondialisation et la relocalisation des filière industrielles essentielles ne peuvent se réduire à un productivisme aveugle et non écologique.  

Frontières

Pour saisir la portée de ces enjeux, un retour sur la question des frontières, ligne de démarcation idéologique, est utile et révélateur. Le RN propose une renationalisation de l'économie française en taxant les produits étrangers, quels qu'ils soient, aux frontières nationales, simplement parce qu'ils sont étrangers. Le protectionnisme peut ainsi être utilisé à des fins purement nationalistes. Mais il peut aussi être utilisé afin de préserver l'environnement et de protéger les travailleurs en taxant non pas aux frontières nationales mais aux frontières européennes les produits réalisés sans respecter les normes environnementales et les règles de l'Organisation Internationale du Travail (interdiction du travail des enfants, conditions de travail décentes, etc.).

Certains libéraux veulent ouvrir les frontières aux marchandises mais les fermer aux hommes et leur libéralisme économique se double d'une xénophobie mortifère. La démondialisation financière et marchande est, elle, fondamentalement humaniste. Elle refuse la mise en concurrence des travailleurs de pays importateurs avec ceux des pays exportateurs, tente de les protéger aussi bien les uns que les autres et retrouve ainsi l'ambition de l'Internationale socialiste. Elle ne saurait verser dans une traque inhumaine des réfugiés pris dans les affres des guerres et de la misère. 

La démondialisation doit intégrer ceux qui cherchent refuges au sein d'un écosystème économique local revivifié. Elle doit protéger les plus faibles et repenser le rapport au travail en se doublant d'un revenu universel d'existence pour toutes et tous. Elle doit permettre d'articuler l'action locale et celle de l'Etat. Elle doit aider l'ensemble des acteurs politiques et économiques à sortir de l'addiction à la recherche effrénée des profits et du mythe de la croissance illimitée. Elle doit savoir concilier la productivité indispensable à la relocalisation des filières stratégiques et la mise en oeuvre d'une véritable écologie politique. 

En définitive, la démondialisation sera écologique et humaniste ou elle ne sera pas.

vendredi 10 avril 2020

Tracking du Covid-19 : une nouvelle servitude volontaire

Participer volontairement à la traçabilité des personnes contaminées par le Covid-19 ne constitue rien de moins qu'une nouvelle servitude volontaire. J'invite chaque citoyenne et chaque citoyen à refuser de participer à toute forme de "tracking", de contrôle permanent des individus et de délation.

"Nous sommes en guerre", "couvre-feu", "drones", "tracking" et traçabilité des personnes contaminées... De crises en crises et à défaut de véritables solutions, la réponse sécuritaire s'impose peu à peu, banalisant le renoncement à nos libertés fondamentales.

Présenter la réponse sécuritaire comme seule réponse possible permet au pouvoir en place de masquer son incapacité à anticiper les crises et à y répondre de façon adéquate.

L'argument sécuritaire, face à la menace terroriste comme face à la menace sanitaire, pousse les citoyens à un "consentement" au renoncement.

La fabrique de ce consentement, véritable tour de force politique, ne constitue rien de moins qu'une nouvelle forme de servitude volontaire.

Dans cette droite ligne, le gouvernement français s'apprête à proposer son application de traçage des personnes contaminées par le Covid-19 sur la base du volontariat.

J'invite chaque citoyenne et chaque citoyen à refuser de participer à toute forme de "tracking", de contrôle permanent des individus et de délation.

Il en va de notre capacité à surmonter les crises que nous traversons sans renier nos valeurs.

Il en va de notre liberté et de notre humanité.