vendredi 11 décembre 2015

Elections régionales PACA, l'abstentionnisme et le vote blanc

Le retrait de liste du PS en PACA laisse les électeurs de gauche orphelins. Beaucoup souhaitent manifester leur rejet des deux candidatures en lice sans pour autant s'abstenir. Pour cela, le vote blanc doit devenir bloquant. Car les Français ne se désintéressent pas de la politique, c'est l'offre politique qui est en inadéquation profonde avec leurs attentes.

"Inadmissible", "honteux", "scandaleux"... les mots sont forts et les témoignages nombreux. Le retrait de la liste PS-PRG-MRC en PACA laisse des électeurs de gauche orphelins, au bord de la nausée, avec le sentiment amer de s'être fait piégés. Impossible de voter pour une liste réellement républicaine au second tour puisqu'il n'y en a plus aucune en lice. On leur demande alors de choisir, selon la très juste expression de Jean-Luc Mélenchon, entre deux "nuances de xénophobie".
La responsabilité collective est grande dans la montée du Front National, depuis une trentaine d'années, à droite comme à gauche.
A gauche, depuis Mitterrand bien sûr, mais encore plus depuis l'arrivée au pouvoir de François Hollande. "Le changement c'est maintenant" s'est mué en la démonstration froide d'une incapacité profonde à proposer un projet de société, une vision fédératrice de l'avenir, tant le prisme de pensée de nos gouvernants s'est emmuré dans une politique libérale austéritaire empêchant toute relance économique et toute action refondatrice. Le ressentiment et le dégoût du peuple sont à la hauteur de son espérance déçue.
Le retrait des listes au second tour de l'élection régionale fausse la donne. Il prive les électeurs d'un véritable choix. Il prive les citoyens d'élus de gauche pour défendre leurs intérêts au niveau régional durant 5 ans. Mais, au-delà de cela, voir la gauche se dédouaner dans une mise en scène auto-sacrificielle et appeler en cœur à voter pour un Christian Estrosi auto-proclamé "résistant", se réclamant impunément du Conseil National de la Résistance, est pitoyable. La tactique politicienne du PS consiste à pouvoir dire en 2017 au candidat de droite "nous, nous avons tout fait pour contrer le FN, y compris sacrifier nos candidats" tout en pensant que le report de voix fonctionnera puisque les électeurs de gauche, eux, ont une conscience républicaine.
A droite, la boîte de Pandore de la "droite décomplexée" a été ouverte par Nicolas Sarkozy. En sont sortis des Nadine Morano, des Laurent Wauquiez, des Eric Ciotti et des Christian Estrosi. A force de courir après l'électorat frontiste ils ont adopté et fait la promotion des thèses d'extrême droite, les banalisant, repoussant sans cesse la ligne de l'inacceptable. Populisme identitaire, islamophobie évidente, recherche permanente du bouc émissaire, stigmatisation constante des minorités, ce flot continue d'atteintes à la cohésion sociale, la main sur le cœur, au nom de la République, porte une lourde responsabilité dans le délitement de notre société et la montée des communautarismes.
Reste deux candidatures en PACA : Marion Maréchal Le Pen et Christian Estrosi. Loin de moi l'idée de dire quoi voter car il revient à chacun de choisir en conscience. Je l'ai déjà dit à la presse qui m'interrogeait à ce sujet, j'admire et j'approuve ceux qui voteront Estrosi pour faire barrage au FN, même si, à titre personnel, cela m'est impossible et que je voterai blanc.
Il est vraisemblable que, face à ce sinistre choix, et même si certains vont voter pour le FN dans un vote d'adhésion et/ou de révolte et que d'autres, à l'inverse, vont voter pour lui barrer la route, la plupart des citoyens va s'abstenir.
Au premier tour de l'élection régionale (au niveau national), l'abstention, les non inscrits et les votes blancs et nuls totalisaient 58% de la population en âge de voter (et le vote blanc seulement 1,2% des inscrits).
Or nous sommes face à deux types d'abstentions distinctes : certains ne votent pas par désintérêt, c'est une abstention a-politique, d'autre ne votent pas par refus de cautionner le système politique actuel et/ou parce qu'aucune offre politique ne leur convient, c'est une abstention politique, voir militante. 
L'abstentionniste militant pose une question importante à la conception de l'expression et de l'action citoyenne. Des individus politisés (au sens noble), impliqués dans le monde associatif et les collectifs citoyens mais qui refusent de voter sont des citoyens actifs rejetant l'acte fondateur de la citoyenneté. Ils n'en sont pas moins citoyens et font parfois preuve d'un sens civique plus important que le citoyen ne s'impliquant que par le vote.
L'une des possibilités pour permettre à ces abstentionnistes politiques d'être et comptabilisés et entendus serait que le vote blanc, actuellement compté mais non considéré comme suffrage exprimé puisse le devenir. Si le vote blanc, en tant que suffrage exprimé, était majoritaire, alors l'élection serait invalidée et nous devrions procéder à un nouveau scrutin jusqu'à ce qu'une offre politique corresponde aux attentes des citoyens.

La reconnaissance pleine et entière du vote blanc, lui procurant un caractère bloquant, est cruciale pour compter les abstentionnistes politiques et leur donner un moyen d'expression par le vote.

Elle montrerait que les Français ne se désintéressent pas de la politique mais que c'est l'offre politique, enfermée dans sa bulle médiatique, son corporatisme et son comportement de caste, qui est en profonde inadéquation avec les attentes des citoyens.

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