jeudi 23 mars 2017

Notre seuil éthique de tolérance

Certains élus se comportent comme une caste privilégiée protégeant les siens : manquement à la parole donnée, mensonge, fraude, corruption, le tout en nous donnant des leçons de probité et en demandant aux plus pauvres de faire toujours plus de sacrifices. L'effarement, la colère puis la nausée nous assaillent. Nous n'en pouvons plus. Nous avons atteint notre seuil éthique de tolérance.

Aux obsèques d'André Tosel m'est revenue en mémoire une discussion que nous avions eu jadis. Je lui expliquais laborieusement ce pourquoi je ne pouvais plus rester adhérent du parti au sein duquel je militais. Après m'avoir longuement écouté, il résuma en une phrase simple et limpide le déluge verbal auquel je m'étais livré dans le marasme d'une situation qui me semblait alors inextricable : "vous avez atteint votre seuil éthique de tolérance."
Si la sagacité du philosophe m'a alors marqué, ses mots résonnent encore en mon esprit. Mais, bien au-delà de ma situation personnelle et de la déliquescence du Parti Socialiste que j'ai quitté depuis, c'est notre société dans son ensemble qui a atteint, aujourd'hui, son "seuil éthique de tolérance".
Violence inouïe du terrorisme et peur permanente des attentats, crise écologique majeure, crise humanitaire des réfugiés politiques, économiques et écologiques, injustices sociales et captation des richesses par le plus petit nombre, discriminations organisées par les autorités elles-mêmes, partout, populisme, xénophobie, repli identitaire et rejet de l'autre. La haine est là, palpable, prête à exploser sous le moindre prétexte.
A ce sombre tableau s'ajoute l'impunité totale d'une classe dirigeante infecte. Certains de nos représentants, pourtant démocratiquement élus, se comportent comme une caste privilégiée protégeant les siens : manquement à la parole donnée, mensonge, indignité, fraude, corruption, le tout en donnant des leçons de probité à la terre entière et en demandant aux plus pauvres de faire toujours plus de sacrifices.
L'effarement devant de tels comportements fait place à la colère devant tant de morgue. La colère cède à son tour devant la nausée qui nous prend et nous submerge. Nous n'en pouvons plus.
Oui, nous avons bien souvent l'impression de nous battre contre des moulins à vent. Oui, la tentation est grande de baisser les bras, de se retirer du monde ou de tenter de le subir le moins possible dans un sauve-qui-peut généralisé. Mais nous savons, au fond de nous, que nous ne pouvons pas ne pas agir, que nous devons faire face. Nous devons alors faire le pari de l'empathie, de la bienveillance et de l'humain. Nous devons revenir à nos fondamentaux d'humanisme et de solidarité, chacun apportant sa part. 
Mais, dans l'urgence d'une élection présidentielle, nous devons avant tout et au minimum sanctionner le mensonge et la corruption. Le maintien des candidatures de Marine Le Pen et de François Fillon est tellement aberrant qu'on nous pousse presque à remercier Bruno Le Roux d'avoir démissionné. Cette situation est surréaliste.
L'assainissement des pratiques publiques et de l'usage du pouvoir est la condition de possibilité d'une démocratie saine et active. C'est l'une des clefs de la lutte contre l'abstentionnisme et donc de l'indispensable barrage à l'extrême droite. Oui, nous avons bel et bien atteint notre seuil éthique de tolérance. Et l'avènement de la VIème République n'en n'est que plus urgent et plus indispensable encore.

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