mercredi 25 novembre 2015

Souviens toi l'été dernier : la Côte d'Azur, une plage de sable et... le roi d'Arabie Saoudite

Été 2015, la République s'efface devant le roi d'Arabie Saoudite, privatisant pour lui une plage publique au nom du partenariat financier entre le pays des Lumières et le pays de l'islamisme radical. Cet épisode est un symbole de la dérive de la politique étrangère française qui, renonçant à ses valeurs, renonce peu à peu à peser dans le monde et à parler au nom des droits de l'Homme.

Nous étions nombreux, l'été dernier, à nous émouvoir de la privatisation d'une plage azuréenne au profit du roi d'Arabie Saoudite (lire ici et ici).

Je me souviens d'élus locaux nous expliquant qu'il fallait penser aux retombées économiques du royal séjour, le roi venant avec une suite de 1000 personnes venant consommer chez nous, avec près de 800 chambres réservées.

Je me souviens des décomptes précis des bénéfices attendus pour la restauration, l'hôtellerie et les commerces des villes voisines publiés dans la presse azuréenne.

Je me souviens du sous-Prefet de Grasse, représentant de l'État, nous expliquant que l'on ne pouvait froisser l'Arabie Saoudite qui "a fourni un milliard d'euros pour équiper l'armée libanaise en armes françaises."

Le drame tout entier de la politique étrangère française est contenu dans ce type d'affaires : prétendre être le pays des droits de l'Homme tout en les reniant pour de l'argent.

La France occupe encore sur la scène internationale une place bien supérieure à sa force de frappe militaire réelle et à sa puissance économique, une place symbolique due à son glorieux passé de pays des droits de l'Homme, de la Révolution et des Lumières.

Elle porte aux yeux du monde les valeurs de liberté, de justice et de droit.

Renier ces valeurs c'est détruire le modèle qui guide bien des peuples opprimés dans leur lutte pour l'émancipation.

Renier ces valeurs c'est affaiblir le poids de la France dans le concert des nations.

Nous pouvons vendre notre football et nos banlieues au Qatar, céder une plage et vendre des armes au roi d'Arabie Saoudite, mais que faisons nous de la France ?

Je me souviens de Nicolas Sarkozy déroulant le tapis rouge à Kadhafi, le laissant dresser sa tente sur les ors de la République, pour bombarder quelques années après son pays, au prix de combien de réfugiés et de morts en mer.

Est-ce cela la France ?

Je me souviens de Manuel Valls, en octobre dernier, reçu avec les honneurs en Arabie Saoudite avec qui la France venait de conclure 10 milliards d'euros de contrats, un pays ayant exécuté plus de 130 personnes en 2015, berceau de l'islamisme radical, financeur notoire du terrorisme. Et Manuel Valls, de Ryad, prononçant des mots très durs et qui semblent aujourd'hui si dérisoires sur les "voyous" et les violences "inacceptables" à l'encontre d'un cadre d'Air France à la chemise en lambeau...

Est-ce bien cela la France ?

La France ne pourra refonder une politique internationale juste et éthique que si elle arrête de vivre des guerres menées par des dictateurs en leur vendant des armes et que si elle renonce à s'allier à ceux qui alimentent et financent le fanatisme religieux.

Alors seulement elle pourra, en toute légitimité, parler à nouveau au nom des droits de l'Homme.

Et si, quand bien même les interventions militaires en Irak, en Libye et en Afghanistan ont été des échecs, nous sommes certains de pouvoir "éradiquer" Daesh avec une coalition internationale ; et si cette coalition doit inclure les financeurs de l'islamisme comme l'Arabie Saoudite et le Qatar et des dictateurs comme Poutine ou Bachar el-Assad ; par décence, ne dites pas agir au nom des droits de l'Homme et n'appeler jamais cette convergence temporaire d’intérêts une "coalition de la paix".

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