vendredi 29 mars 2024

Le quartier des Moulins à Nice, un double constat d'échec

 


Communiqué de presse du rassemblement citoyens Viva :

Le quartier des Moulins à Nice, un double constat d'échec

 

La situation dans le quartier des Moulins est insupportable. C'est une souffrance pour les milliers d'habitant.es qui tentent d'y vivre. Un cap a été franchi depuis plusieurs mois avec des tirs en pleine rue, une recrudescence de règlements de compte violents causant de nombreuses victimes et blessés graves.

Cette situation met en évidence deux échecs :

-        Le premier échec, celui des opérations XXL, avec descentes massives des forces de l'ordre sur un temps donné. Vieille méthode pour impressionner, faire du battage médiatique et, il est vrai, permettre à la population de souffler quelques jours. Mais chacun sait d'expérience qu'une fois le dernier car de CRS parti, les trafics reprennent place comme si de rien n'était.

Face à la situation dans le quartier, le premier adjoint de Christian Estrosi, Anthony Borré, chargé de la sécurité, propose ni plus ni moins que l'intervention de l'armée. Pour les tenants du tout sécuritaire dont la police municipale et les outils technologiques devaient servir de rempart face à tous les dangers, l’aveu d’échec est cuisant.

-        Le second échec, c'est celui de la lutte contre le trafic des stupéfiants et de la prohibition.

La situation des Moulins se retrouve dans différents quartiers ou secteurs en France. Elle est le reflet d'un échec plus général, celui des politiques menées depuis plus de 50 ans contre les trafics des stupéfiants : la prohibition.

Il est urgent d'imposer le débat pour sortir de cette impasse, de ces échecs à répétition au coût important pour le pays. Ce débat se pose, d’autant plus qu’il ne concerne pas une petite frange de la population, mais plus de 4,5 millions de consommateurs occasionnels en France, plus de 70 000 dans notre département (1). Alors que la lutte contre les stupéfiants est un échec patent, elle monopolise une grande part des moyens de police et elle encombre la justice (2). L'argent dédié à la prohibition du cannabis pourrait être réinvesti dans la santé publique.

De nombreux pays cherchent des alternatives au tout répressif qui a échoué comme en France. L'Allemagne vient d'annoncer la légalisation encadrée du cannabis à usage récréatif à compter du 1er avril, avec des limites de quantités produites et consommées et des limites de périmètres de consommation. La Ville de Strasbourg se déclare favorable à une expérimentation locale. Le Rassemblement Citoyen VIVA appelle à l'ouverture d'un grand débat public sur le sujet.

Soyons honnêtes, il n'y aura pas de recette miracle. Les solutions ne découleront pas d’opérations ponctuelles, mais d'un travail intelligent sur le long terme, avec une volonté politique forte, qui nécessitera un travail collectif et multifactoriel :

- Déploiement d’une véritable police de proximité, tout au long de l’année, une présence humaine, douée d'une expertise de terrain sérieuse, que ne saurait remplacer la multiplication des caméras, drones et des bornes d'alerte.

- Renforcement des moyens alloués à la police judiciaire qui permet de démanteler les réseaux de trafic de drogue et pas simplement interpeller les revendeurs

- Renforcement des moyens alloués à la justice dont nombre de magistrats ont établi des constats clairs et des recommandations fortes

- Renforcement des moyens alloués aux services de préventions, de soins, et de prise en charge de la toxicomanie. La santé est la grande absente des politiques qui croient que la répression résout seule tous les problèmes.

- Poursuite et accélération du renouvellement urbain et renforcement de l’accompagnement social, aux Moulins comme dans les autres quartiers défavorisés de Nice : casser la ghettoïsation et les barres HLM, faire émerger un habitat à dimension humaine, renforcer la présence des pouvoirs publics et soutenir bien davantage le monde associatif.

- Mise en œuvre d'une véritable politique à l’attention de la jeunesse en cessant de stigmatiser les jeunes des quartiers. C’est l’absence de perspectives offertes aux jeunes qui les poussent à grossir les réseaux de trafiquants.

- Ouverture d’un débat public sérieux et argumenté sur la légalisation ou la dépénalisation du cannabis, loin des postures caricaturales, pour envisager toutes les pistes permettant de trouver une solution après 50 ans d’échecs de la prohibition. La ville de Strasbourg se dit favorable à une expérimentation locale. La Ville de Nice doit y réfléchir et se donner les moyens de trouver une alternative.

Nice, le 29 mars 2024

Rassemblement citoyen Viva

(1) Selon les chiffres présentés par Santé Publique France, « En 2021, la moitié de la population adulte âgée de 18 à 64 ans déclare avoir déjà consommé du cannabis au cours de sa vie (....) en 2021, 10,6 % des adultes ont consommé du cannabis dans l’année,...». La région PACA est celle où l'usage quotidien est un des plus élevé, avec 2,7% de la population de 18 à 64 ans (Seule l'Occitanie nous dépasse avec 3%). On dénombre, en France, plus de 4,5 millions de consommateurs occasionnels et 700000 consommateurs quotidiens en France. Rapporté à notre département, cela concerne plus de 10 000 consommateurs quotidiens, 70 000 occasionnels, sans compter les touristes.

(2) en 2019, 220 000 infractions relatives aux stupéfiants ont fait l’objet de 150 000 procédures enregistrées par la police ou la gendarmerie. 80% des procédures concernaient uniquement l'usage de stupéfiants et non le trafic).


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