vendredi 3 avril 2015

Ainsi parla Michel Onfray... à Cannes

Michel Onfray est venu à Cannes délivrer une parole tantôt brillante et lumineuse tantôt facile et paresseuse.
Pour écouter Michel Onfray à Cannes, il fallait d'abord débourser la somme de 15 €, et tant pis si, dans la Grèce antique qu'il cite si souvent, Socrate dispensait son enseignement gratuitement pendant que les Sophistes faisaient payer quiconque souhaitait les écouter.
Pour écouter Michel Onfray, ma voisine de droite est venue parée de ses plus beaux atours, comme un soir de gala habituel, d'opéra ou de comédie au théâtre de Cannes. Et elle était loin d'être la seule à porter des signes ostentatoires de luxe et de richesse.
Elle et ses semblables ont ri de bon cœur quand le philosophe trublion a raillé François Hollande, un peu moins quand il s'en est pris à "Nicolas S." Ils ont vivement approuvé l'intellectuel quand il a déclaré l'Islam incompatible avec la République, citant toutes les atrocités et les appels aux meurtres qu'il a pu trouver dans le Coran, un peu moins quand il a expliqué que le Christ n'avait pas d'existence historique et qu'il avait surement été inventé de toutes pièces. Ils ont applaudi lorsqu'il a raillé les trentenaires à trottinette et l'abrutissement télévisuel généralisé. Ils ont gardé le silence quand il a asséné, comme une évidence, que l'argent rendait idiot.
Ainsi parla Michel Onfray à Cannes, par David Nakache

Alors, en définitive, que penser de la prestation tarifée du penseur ?
Michel Onfray discourrait hier soir sur "L'esprit français", dont il rattacha l'acte de naissance, sans peut être le dire suffisamment explicitement, au moment où l'on commença à philosopher en français. Rabelais, La Boétie, Descartes, mais surtout Montaigne, dont l'éloge faisait plaisir à entendre.
Approche très intéressante de la "tension" dans la laquelle oscille l'esprit français incarnée par des "couples" successifs : Voltaire - Rousseau, Sartre - Camus, De Gaulle - Pétain, etc.
Approche enrichissante encore lorsqu'il explique le triptyque "liberté, égalité, fraternité", reprenant la citation complète de Robespierre : "Liberté, égalité, fraternité... ou la mort".
Approche à contre courant, et qui donne à penser, lorsqu'il plaide pour une nouvelle laïcité, préférant financer un culte musulman républicain plutot que laisser se financer, aidé de l'extérieur, un islam salafiste en France : aucune loi, même celle de 1905, n'est figée dans le marbre et ne peut être révisée.
Et c'est peut être là, au moment où Michel Onfray prend à bras le corps la question de l'Islam en France, avec ce soucis permanent du réel, que l'on bascule du discours rigoureux à la prise de position provocatrice, s'auto alimentant de sa propre témérité, comme ressourcée par cette si belle image qu'il se renvoie en permanence à lui-même, celle du philosophe assénant sa vérité à coup de marteau, seul contre tous.
C'est en effet là que la pensée du réel analysant l'histoire immédiate révèle ses apories. Michel Onfray, rejetant le mouvement "je suis Charly" d'un revers de la main et d'un bon mot bien senti, affirme contre ceux qui prônent le "pas d'amalgame" entre Islam et islamisme,  que l'Islam est intrinsèquement incompatible avec la République car le Coran contient des appels au meurtre des juifs, des passages homophobes, etc. Si l'argument fait mouche sur l'élégant public cannois, il ne resiste pas à un examen plus attentif.
Tout d'abord,  si le Coran contient des textes d'une violence extrême, l'ancien testament n'est pas en reste et, parlant d'homophobie, que l'on se souvienne de Sodome et Gomorrhe... Le judaïsme est il lui aussi, pour cette raison, incompatible avec la République ? Silence du philosophe.
Ensuite, si le nouveau testament nous enseigne que Dieu est amour. On a tout de même fait, au nom de ce Dieu-amour, la Saint Barthélémy,  l'Inquisition et la Reconquista.
Si, selon Michel Onfray, le contenu du Coran disqualifie l'Islam à tout républicanisme possible, cela veut il dire qu'une religion est réductible au contenu de son texte saint ? Le phénomène religieux n'est il pas éminemment plus complexe que cela ? Silence de l'exégète.
Et comment le philosophe peut il alors prôner, par la suite, un Islam républicain financé par l'Etat français (avec l'argent du contribuable athée, agnostique, bouddhiste ou chrétien) si l'Islam est irrémédiablement incompatible avec la République à cause du contenu du Coran ?
En réalité, les hommes sont capables du meilleur comme du pire au nom d'une même religion ou d'un même texte saint.
Au nom du christianisme, on soigne, on distribue de la nourriture, on enseigne, et l'on a pourtant fait les guerres de religions et brûlé les impies sur les bûchers.
Au nom de l'Islam, on soigne, on distribue de la nourriture, on enseigne et on lapide pourtant la femme infidèle et on pose des bombes dans des attentats suicides.
La folie meurtrière prendra toujours tous les prétextes pour tuer et asseoir sa domination, que ce soit le culte de l'être suprême, un désir de revanche, une théorie des races ou, ici, la religion.
Et à chaque fois que des hommes, sous couvert de religion, réussiront à persuader d'autres hommes de se battre et de mourir, et, comme l'écrit Spinoza, "de combattre pour leur servitude comme s'il s'agissait de leur salut", le processus théologico-politique fonctionnera à nouveau. Et l'opposition se situe davantage entre rationalité et croyance qu'entre telle ou telle religion à qui le "sage" attribuerait selon son bon vouloir un bon point ou un blâme.
Mais Michel Onfray n'a cure de tout cela. Il sort une boutade, fait rire, amuse la galerie tout en rendant la pensée accessible à tous et tout en brisant des tabous, tout cela pèle mêle, le pire comme le meilleur, comme un funambule en déséquilibre sur son fil dont la chute ne ferait même pas rire. Car la chute du discours d'Onfray, hier soir, était bien un déclinisme zemmourien facile, annonçant la fin de notre civilisation au profit d'un Islam conquérant.
Mais qu'importe tout cela, le pourfendeur (à juste titre) du consumérisme et de l'argent roi a fini, visiblement satisfait de lui-même, sous les acclamations cannoises...

mardi 24 mars 2015

Elections départementales 2015 dans les Alpes-Maritimes, une défaite prévisible

Il est toujours difficile d’analyser la situation au lendemain d’une défaite. Au sortir du 1er tour des élections départementales 2015, dans les Alpes-Maritimes, la défaite est cinglante et appelle à une remise en question sans concession. La Gauche est éliminée dans 25 cantons sur 27 et cette déroute ne fait que confirmer et amplifier celle des municipales de 2014. Pour autant, nous ne devons pas noircir le tableau abusivement.
Marie Louise Gourdon et Jean Raymond Vinciguerra sont encore en lice à Grasse-2,  de même que le binôme Front de Gauche Tomasini – Tujague à Contes, et nous devons tout faire pour les aider à gagner.
La fédération du Parti Socialiste des Alpes-Maritimes a fait le pari de la jeunesse et du renouvellement. Je salue ce choix malgré la défaite. Nos candidats battus ont fait des campagnes courageuses et je tiens à les en féliciter. Un bon nombre d’entre eux a débuté la campagne avec un degré de notoriété quasi nul et ils ont tous obtenu des scores plus qu’honorables compte tenu du contexte.

vendredi 20 février 2015

Aéroport de Nice : la démocratie participative détournée

Le 19 février 2015 restera à Nice comme un tournant, un pallier important franchi dans la vie démocratique locale, mais un pallier négatif.
Le Maire de Nice a organisé une consultation publique sur la privatisation de l'aéroport de Nice prévue à l'article 49 de la loi Macron.
Le résultat du vote est sans appel : 97,5% des votants ont dit "non" à cette privatisation.
Ce résultat n'est pas surprenant. Si nous sommes nombreux, et pour des raisons souvent différentes, à nous opposer à la loi Macron, l'ensemble de la classe politique locale s'est prononcée contre cette privatisation, au sein du conseil municipal comme en dehors. Les électeurs se rendent bien compte que brader un équipement public bénéficiaire aux actionnaires privés est, après la privatisation des autoroutes, une nouvelle absurdité.
Mais plus inquiétant est le taux record d'abstention : 83,3 % ! Doit on tenir compte d'un vote lorsque l'abstention dépasse les 80% ? La question se pose.

vendredi 13 février 2015

Aéroport de Nice : entre Macron et Estrosi, on n'est vraiment pas verni !

La privatisation de l'aéroport de Nice a été votée hier à l'Assemblée Nationale sous l'impulsion d'un gouvernement dit de gauche. La marche des privatisations a repris de plus belle sous une gauche renonçant à ses valeurs et à sa ligne économique. Capitulation ou conversion à un capitalisme socialiste, la loi Macron est un condensé de libéralisme appliqué dont la privatisation de l'aéroport de Nice est l'un des nombreux dégâts collatéraux. 
Camarades socialistes azuréens, vous qui êtes cette fois-ci directement concernés, comprenez-vous désormais pourquoi nous portons le fer contre la politique menée par ce gouvernement, nous, socialistes qui n'avons renoncé ni à nos engagements ni à nos valeurs ?
Face à la privatisation de l'aéroport de Nice, Christian Estrosi tente de se poser en défenseur d'une souveraineté économique locale en réalité perdue depuis longtemps. Lui qui, appartenant à des gouvernements libéraux, n'a fait que participer à ce long processus de captation des biens et équipements publics par les grands groupes privés ; lui qui a voté en 2005, précisément, une loi permettant l'ouverture du capital de l'aéroport de Paris ; lui qui, Président du Conseil Général des Alpes-Maritimes puis Maire de Nice et Président de la Métropole Nice Côte d'Azur n'a rien fait pour lutter contre le règne de l'argent roi sur la Côte d'Azur, et qui, bien au contraire, l'a facilité et amplifié. 

lundi 9 février 2015

Combien coûte la campagne du "Non" à la privatisation de l'aéroport de Nice ?

Christian Estrosi a choisi de consulter la population niçoise sur la privatisation possible de l'aéroport de Nice prévue par la loi Macron, actuellement en débat à l'Assemblée Nationale.
Ce choix peut surprendre pour au moins quatre raisons :
- Christian Estrosi a voté une loi en 2005 permettant l'ouverture du capital des aéroports, à la suite de quoi, en 2008, l'aéroport de Nice a perdu son statut d'établissement public.
- Alors que son opposition le lui réclamait, le Maire de Nice s'est refusé à organiser une consultation populaire sur le passage en souterrain de la ligne 2 du tramway et s'était alors montré peu favorable aux referendum locaux.
- L'ensemble des partis politiques siégeant au conseil municipal s'est prononcé contre la privatisation de l'aéroport. Il n'y a donc aucune opposition locale sur le sujet et la consultation ne servira pas à départager deux camps opposés.
- Ce n'est pas la Ville de Nice qui est actuellement actionnaire de l'aéroport mais la Métropole Nice Côte d'Azur. La logique voudrait que la consultation populaire soit métropolitaine et non communale.
Quand bien même nous sommes opposés à la privatisation de l'aéroport de Nice, quand bien même nous sommes par principe favorables à la consultation populaire locale, nous sommes en droit de nous interroger sur la pertinence de celle-ci, notamment au regard de son coût, annoncé à 100 000 € en Conseil Municipal.
Cette somme, si elle englobe la tenue des bureaux de vote et les envois des documents "papier" aux électeur, ne peut permettre de financer la campagne d'affichage massive déployée dans la ville :
  
Deux questions se posent alors :
- Combien coûte aux contribuables niçois la campagne publicitaire du "non" à la privatisation de l'aéroport de Nice ?
- Est-ce à la collectivité organisatrice de la consultation de dire aux citoyens ce qu'ils doivent voter ?
Deux questions auxquelles la consultation publique du 19 février ne permettra pas de répondre...