mardi 14 novembre 2023

Normalisation de l'extrême droite niçoise

 

Normalisation de l'extrême droite niçoise 



La marche contre l'antisémitisme du dimanche 12 novembre 2023 a été l'objet, en France, d'une instrumentalisation politicienne : loin de sa juste cause, elle a servi à normaliser les extrêmes droites françaises.

A Paris, Elisabeth Borne, première ministre, a défilé avec ceux qu'elle qualifiait quelques mois plus tôt "héritiers de Pétain". L'ensemble de la classe politique du centre et de la droite a ainsi adoubé Marine Le Pen, Jordan Bardella, Éric Zemmour et Marion Maréchal, lavant officiellement l'extrême droite de son passé.

Rappelons que lorsque nous luttons contre l'antisémitisme nous luttons contre toute forme de discrimination et de racisme. S'associer à des forces politiques qui refusent d'accepter l'égalité entre tous les êtres humains est incompatible avec la lutte contre l'antisémitisme.

A Nice, la querelle entre Christian Estrosi et Eric Ciotti passant pour eux avant la lutte contre l'antisémitisme, il y a eu deux rassemblements. Dans chacun des deux rassemblements, Philippe Vardon fut présent et intégré parmi les élus, achevant ainsi le long processus de normalisation de l'extrême droite la plus radicale.

Philippe Vardon, conseiller municipal et métropolitain niçois, a participé dans sa jeunesse a un concert entouré de jeunes faisant le salut hitlérien, chantant des chansons du groupe Fraction Hexagone ou "Zyclon Army" d'Evil Skins. Il est passé par le Bloc identitaire, Nissa Rebela, Unité radicale, le MNR de Bruno Mégret, le RN de Marine Le Pen et est désormais membre de Reconquête d'Eric Zemmour. Il incarne une frange politique de l'extrême droite française la plus radicale ayant accédé au statut d'élu.

Christian Estrosi l'a qualifié en 2017 "d'héritier de Goebbels" mais ne cesse depuis de trouver avec lui des convergences au conseil municipal et au conseil métropolitain. Ils étaient présents ensemble dimanche 12 novembre. Christian Estrosi y a déclaré : "La haine a changé de visage mais elle n'a pas changé de victimes". Or si l'antisémitisme est aujourd'hui alimenté à la fois par l'extrême droite française et par les mouvements djihadistes, le maire de Nice fait volontairement comme si l'extrême droite n'était plus une menace pour les français de confession juive.

Comme à Paris, l'extrême droite est désormais officiellement normalisée. Mais, à Nice, la confusion est encore accrue car les prises de positions d'Eric Ciotti et Christian Estrosi sont souvent très proches de celles de l'extrême droite.

Eric Ciotti reprend à son compte des thèses classiques d'extrêmes droite comme le retour au droit du sang. Il pousse l'ensemble de sa famille politique, sur la question migratoire et sur l'intégration des personnes de nationalité étrangère, sur des positions souvent plus extrêmes que celles du RN. Il utilise la question du referendum de façon populiste pour dresser les français contre les étrangers et fracturer la société française. Au Département des Alpes-Maritimes il n'a eu de cesse de stigmatiser les bénéficiaires du RSA et les mineurs isolés étrangers. Il glorifie l'ordre, l'uniforme et le culte de l'autorité. Il n'y a aujourd'hui plus aucun moyen objectif de différencier un discours ou un projet de loi d'Eric Ciotti de ceux de l'extrême droite.

Christian Estrosi se place dans la filiation de Jacques Médecin qui se déclarait lui même d'accord à 99% avec les idées du FN. Il a intégré dans on équipe municipale et métropolitaine Gael Nofri, ancien directeur de campagne de Jean Marie Le Pen aux élections européennes de 2014. Il tient régulièrement des propos hostiles aux étrangers, aux Roms et aux musulmans (l'islam et la démocratie seraient "incompatibles" ; donner le droit de vote aux étrangers reviendrait à donner le droit de vote à "ceux qui haïssent la France" ; il déclare vouloir "mater" les Roms et a proposé sa méthode à tous les maires de France ; etc.). Il mène une politique du tout sécuritaire à outrance et du contrôle permanent des personnes. Il pratique une ségrégation urbaine en repoussant sans cesse le désenclavement du quartier de l'Ariane, en stigmatisant les pauvres et en organisant la traque des migrants. Il est bien difficile aujourd'hui de différencier la gestion de Nice par Christian Estrosi de la gestion par l'extrême droite des villes où elle est majoritaire.

De nombreux opposants politiques comme certains journalistes ont d'abord qualifié la ligne politique incarnée par Christian Estrosi et Eric Ciotti de "droite radicale" puis de "droite extrême". Ils ne savent plus vraiment quel qualificatif employer aujourd'hui. Certains vont jusqu'à penser que, de Christian Estrosi à Eric Ciotti et d'Eric Ciotti à Philippe Vardon, nous sommes désormais confrontés à Nice à un continuum gradué de droites extrêmes ou d'extrêmes droites.

Cette normalisation de l'extrême droite niçoise est grave et lourde de conséquences. Il revient désormais à Christian Estrosi et Eric Ciotti de dire et de démontrer publiquement ce qui les différencie encore de ceux avec qui ils s'associent.

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