jeudi 21 mars 2013

Christian Estrosi, le vote pied-noir et la tentation communautariste

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On ne peut que s'interroger sur la stratégie d'exacerbation permanente de la question pied-noire à Nice par Christian Estrosi.
De la stèle érigée sur la Promenade des Anglais symbolisant la fracture au lieu d'inciter à la réconciliation, du "vive l'Algérie française" lancé en marge d'une manifestation de rapatriés le 20 octobre 2012, au refus catégorique de commémorer le 19 mars, il est rare, de nos jours, que le réflexe communautariste pied-noir reçoive autant d’encouragements et de soutiens de la part d'un élu de la République.
La communauté pied-noire à Nice pèse lourd sur les échéances électorales et notamment municipales. Pire, elle vient peser de tout son poids... du côté du FN. Déjà en campagne pour 2014, Christian Estrosi n'a de cesse de flatter les Pieds-Noirs niçois pour siphonner le vote FN à Nice.
Surfant sur le rejet de la date du 19 mars, et quand bien même cette commémoration célèbre les victimes civiles et militaires des deux camps, de la guerre d'Algérie mais aussi des combats en Tunisie et au Maroc, le maire de Nice cultive le ressentiment, empêche volontairement les cicatrices de se refermer et souffle en permanence sur les braises de l'histoire à des fins électoralistes.

samedi 2 mars 2013

Primaires ouvertes : contre "la démocratie à géographie variable"

Le Parti Socialiste s'apprête à décider de faire des primaires "à la carte", là où ça l'arrange, là où cela ne dérange pas trop ses barons locaux.
Les primaires ouvertes aux élections locales ? "On en fera par ici, on n'en fera pas par là !"
On ne décide pas d'un mode de désignation des candidats, et donc d'un mode de scrutin, en fonction des candidats du moment. On ne négocie pas la démocratie par des petits arrangements entre amis. Ce n'est pas comme cela que l'on doit faire de la politique.
Les primaires ouvertes aux élections locales sont une chance à la fois pour la rénovation du Parti Socialiste et pour celle des pratiques démocratiques françaises. Elles permettraient :
  • D'innover et de renouer avec l'élan brisé de la rénovation et de l'exemplarité démocratique alors que les élections de mi-mandat sont traditionnellement un revers pour le parti au pouvoir.
  • D'accélérer le renouvellement du personnel politique et d'améliorer la représentativité des élus, en alliant les primaires ouvertes à la non investiture des cumulards.

mardi 19 février 2013

Allocations familiales: sous conditions de ressources, oui, fiscalisées, non !

L'idée de limiter les allocations familiales n'est pas une idée scandaleuse. Mais, pour avoir un débat de qualité sur la question il faut tout d'abord savoir de quoi l'on parle (ce qui est), et, ensuite, savoir ce vers quoi l'on veut tendre (ce qui doit être).
Nous parlons d'une façon floue des allocations familiales et beaucoup pensent à l'aide qu'ils touchent pour leur enfant en bas âge (moins de trois ans), ou à l'aide qu'ils perçoivent parce qu'ils ont une famille nombreuse (à partir de trois enfants) ou encore aux aides au logement.
En réalité, les prestations familiales sont diverses et sensées répondre à des besoins spécifiques : la Prestation d'Accueil du Jeune Enfant (PAJE), sous conditions de ressources, est versée pour un enfant de moins de trois ans. Le Complément Familial, sous conditions de ressources également, est versé pour les familles ayant au moins trois enfants de plus de trois ans. Des prestations sont liées au handicap (AAH, AEEH), d'autres à l'isolement (ASF, RSA majoré), d'autres encore au logement (AL ou APL), à la précarité (RSA) ou la rentrée scolaire (ARS).
Parmi toutes ces prestations, les allocations familiales de base (AL), celles qui font l'objet de la controverse, sont versées sans condition de ressource à toute personne ayant au moins deux enfants à charge dont l'ainé à moins de 20 ans. Elles sont issues d'une politique nataliste tendant à inciter les parents à avoir plus d'enfants, les allocations étant majorées en fonction du nombre d'enfants supplémentaires.

jeudi 7 février 2013

Séparation des activités bancaires : Esprit du Bourget, es-tu là ?

Depuis le début du quinquennat, si les engagements sociétaux sont tenus et saturent l'espace médiatique, si le changement semble véritablement à l'œuvre en matière de santé, de logement, d'éducation ou de justice et si François Hollande est irréprochable dans la représentation de la France à l'étranger, la politique économique, elle, constitue le véritable talon d'Achille du retour de la gauche au pouvoir.
Le volontarisme politique et l'interventionnisme d'Arnaud Montebourg ont été stoppés net dans leur élan avec le désaveu public que lui a inutilement infligé Jean-Marc Ayrault. Ce coup d'arrêt, au moment même où le recours possible à la nationalisation temporaire comme outils de réaffirmation de la souveraineté industrielle de la France trouvait un véritable écho populaire et obtenait l'adhésion au-delà des positions partisanes, est le symptôme d'une gauche qui s'auto-censure. Le gouvernement se prive de ses meilleures armes pour lutter contre une mondialisation aussi déloyale que destructrice et Florange restera comme le moment de l'auto-mutilation politique du changement.

dimanche 6 janvier 2013

Nice : SDF, toxicomanie, soins psychologiques... cachez cette misère que je ne saurais voir !

Nice : trop, c'est trop. Une succession de décisions politiques prises par Christian Estrosi concourent à dessiner une stratégie aussi cohérente qu'odieuse et délibérément discriminatoire.
Cette stratégie se déroule en trois temps : 
1. Commençons par délimiter une zone "propre", un centre ville aseptisé où s'arrêteront les cars de touristes, une vitrine devenant la locomotive touristique et donc financière de la ville.
2. Ensuite, dotons cette zone privilégiée de tous les atouts, au détriment des zones périphériques : tram, vélos bleus, espaces verts, réhabilitations, zones piétonnes, vidéosurveillance et présence policière permanente... 
3. Enfin, chassons méthodiquement tout ce qui, dans cette zone, pourrait déplaire :  pauvres, SDF, drogués et, désormais, personnes nécessitant une prise en charge psychologique.
Vous doutez ? Trop gros pour être vrai ? Réponse locale : plus c'est gros, plus ça passe !
Regardons tout cela dans le détail :

vendredi 28 décembre 2012

Agression d'un policier à Nice : les limites de la vidéosurveillance




L'agression d'un adjoint de sécurité à Nice le 25 décembre (lire ici) est révélateur à bien des niveaux. Outre le fait, pour l'adjoint de sécurité en question, qu'annoncer à ses agresseurs qu'il était policier n'a fait qu'empirer les choses et les exciter d'avantage, c'est sur ce qu'elle nous enseigne sur la vidéosurveillance que je voudrais revenir ici.

La vidéosurveillance a permis d'arrêter très rapidement les auteurs présumés de l'agression et Christian Estrosi s'en félicite à juste titre (lire ici).

Mais, si elle a permis l'identification et l'arrestation rapide, elle n'a en rien permis d'éviter l'agression en dissuadant ce groupe d'individus éméchés et violents d'agir. Et Patrick Allemand le souligne, également à juste titre (lire ici).

La vidéosurveillance, rebaptisée et aseptisée en « vidéoprotection », reste la figure la plus emblématique et la plus coûteuse du laboratoire niçois de lutte contre l’insécurité. Elle mobilise une part importante du budget dédié à la sécurité et une part importante des forces de polices. 

Sans entrer ici dans la bataille de chiffres prouvant ou non son impact sur la baisse de la délinquance et des atteintes aux personnes, il convient de rappeler des distinctions de bases. 

En matière de sécurité, on distingue les actions de prévention et les actions de répressions. Le maire est en charge de la prévention (dissuader les délinquants potentiels d'agir) et l’Etat (et donc le Préfet qui le représente dans le département), est en charge de la répression (identifier et arrêter les coupables).

jeudi 25 octobre 2012

Daniel Cohen, Homo Economicus, la postérité du vide

Le dernier livre de Daniel Cohen Homo Economicus, prophète (égaré) des temps nouveaux est un ouvrage touchant au cœur de nos difficultés contemporaines et mettant à nu les limites d'un système à bout de souffle.

Se livrant non pas à une énième analyse détaillée des mécanismes conduisant à la crise et à la faillite du système néolibéral, l'auteur s'attache à analyser les conséquences morales et sociales de cette dérive. L'économiste se fait alors philosophe et délaisse l'analyse froide des mécanismes financiers pour questionner le sens de l'évolution des conditions de travail et de vie, des rapports sociaux et familiaux. Se faisant, il revient à la question grecque de la vie bonne et de la recherche du bonheur, soulignant le paradoxe de notre époque : "Pourquoi le bonheur semble-t-il plus dur aujourd'hui qu'hier à atteindre malgré, dans les pays riches, une richesse matérielle beaucoup plus élevée ?"
 Un monde néo-darwinien voit le jour, où le plus faible est éliminé et "soumis au mépris des vainqueurs". Ce monde est celui de l'homo economicus, celui de la concurrence effrénée comme seule règle de management, de l'évaluation permanente, un monde dont les conséquences dramatiques nous poussent à repenser le rapport entre le bonheur individuel et la marche de la société.